«Je n’arrive pas à oublier les souvenirs. Quand je dors, je vois. » Dans cette petite salle de consultation de la Maison des femmes, à Saint-Denis (93), Fatoumata* évoque ses flashbacks avec Mathilde Delespine. « C’est normal. Cela veut dire que vous êtes normale », veut rassurer la sage-femme, qui tient une consultation spécialisée sur les violences sexuelles. « Les situations vécues sont bien intégrées dans notre cerveau, dans la mémoire. Sauf les viols et les violences, qui restent piégés dans le cerveau », poursuit-elle. Arrivée en France voilà deux ans, Fatoumata est « venue par la mer ». Depuis, elle dort dans la rue ou dans un bus de nuit et cherche à obtenir un statut de réfugiée. Elle a subi viol et excision et craint beaucoup pour sa fille de 6 ans, confiée, le temps du grand voyage, à une amie restée au pays. « Mes parents ont dénoncé mon amie et repris ma fille il y a trois mois environ. Chez nous, l’excision a généralement lieu entre 6 et 8 ans. » Dans deux semaines, Fatoumata reviendra consulter une avocate, pour obtenir des conseils pour protéger son enfant. Quelques jours après, elle participera à un groupe de parole dédié aux violences sexuelles et rencontrera une psychologue. Ouverte depuis juillet 2016, la Maison des femmes est un lieu ressource pour les victimes de violences liées au genre. « En tout cas, vous êtes très jolie aujourd’hui », commente la sage-femme, qui connaît sa patiente depuis un petit mois. « C’est grâce à vous », répond, femme forte, Fatoumata.