COVID-19

Covid-19 : La colère d’une sage-femme

« En ville, on est seul. Mais je ne me suis jamais sentie aussi seule. J’ai l’impression d’avoir été lâchée au milieu de l’océan sans bouée. Je n’ai aucun lien avec les maternités et les hôpitaux qui m’entourent. Je suis très déçue. Il n’y a aucune cohésion entre les professionnels de santé en ville et ceux de l’hôpital. Aucun de mes partenaires habituels ne me répond. Mes patientes accouchent essentiellement dans les maternités de Saint-Cloud et de l’hôpital Foch, dans l’ouest parisien. Dans une moindre mesure, mes autres patientes accouchent à Paris, à l’hôpital Necker, ainsi qu’à la maternité privée Notre Dame de Bon secours de l’hôpital Saint-Joseph, et à la maternité catholique Sainte-Félicité. Pour pouvoir échanger avec les professionnels de ces établissements, j’ai même essayé de passer via mes patientes, en leur demandant de solliciter les professionnels de ces maternités pour moi. Je n’ai eu aucun retour, depuis une semaine. Comment puis-je préparer mes patientes à leur futur accouchement si je ne sais pas quelle conduite à tenir a choisi leur maternité ? Le papa pourra-t-il être présent à l’accouchement ? Auront-elles accès à une analgésie péridurale ? Dans le contexte actuel de l’épidémie de Covid-19, il est permis d’en douter, les anesthésistes étant également réanimateurs. Or, une sage-femme qui ne sait pas répondre ne rassure pas ses patientes. Pour les primipares qui doivent accoucher dans dix jours, la situation est vraiment angoissante. Le problème numéro 1 Dans ce contexte, pourquoi les maternités ne se mettent-elles pas d’accord sur un protocole commun ? Pourquoi ne nous invitent-elles pas à leurs réunions ? Comment dois-je m’organiser pour accueillir les sorties précoces ? Les messages sont contradictoires. Par exemple, une de mes patientes est très angoissée. Elle va très bien, mais lors de la dernière échographie, on lui a annoncé un […]

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Covid-19 et grossesse : ce que dit la science

Cet article a été mis à jour le 31 mars 2020 Le 11 mars, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) décrétait l’état de pandémie pour le Covid-19, maladie provoquée par le coronavirus Sars-Cov-2. À cette même date, la France comptait 2281 cas confirmés et 48 morts. Vingt jours après, malgré le manque de dépistage, notre pays recensait 51 128 cas confirmés, dont 22 757 personnes hospitalisées et 3523 décès à l’hôpital. Le nombre de cas réels, difficile à estimer, était beaucoup plus élevé. Les femmes enceintes, les fœtus et les nouveau-nés, considérés comme vulnérables, sont-ils plus en danger ? Les premiers éléments de réponse fournis par la science sont rassurants. Mais les données sont encore parcellaires et susceptibles d’évoluer. En Chine, un strict confinement, qui a restreint des libertés publiques déjà très limitées, a permis de contenir l’étendue des contaminations. Les autorités ont caché le début de l’épidémie, mais les chercheurs chinois sont ensuite parvenus à transmettre d’importantes données à l’ensemble de la communauté scientifique internationale, à commencer par la séquence du génome viral, qui a permis d’élaborer les tests de dépistage par RT-PCR. Plusieurs articles ont également été publiés en matière de périnatalité.   PAS DE SUR-RISQUE CHEZ LES FEMMES ENCEINTES Dans un rapport de mission menée en Chine entre le 16 et le 24 février 2020, l’OMS soutient que le Sars-Cov-2 n’entraîne pas plus de symptômes chez les femmes enceintes. Sur 147 femmes enceintes infectées, « 8 % ont présenté une maladie sévère et 1 % était critique ». Les cas sévères ont besoin d’une assistance respiratoire mécanique ou présentent des défaillances d’organes qui demandent des soins intensifs. En population générale, « environ un quart des cas sévères et critiques requièrent une ventilation mécanique tandis que les 75 % restants ne requièrent qu’une supplémentation en oxygène », ajoutent les spécialistes. La première étude publiée à […]

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Mort fœtale in utero dans le diois, que dit l’enquête de l’ARS ?

Aimé est décédé le 18 février 2019, entre 19h et 22h, dans la Drôme, quelque-part entre Châtillon-en-Diois et l’hôpital de Die, situé à 20 minutes en voiture. Sa maman était à 7 mois et demi de grossesse. Cette mort fœtale in utero est survenue moins de 14 mois après la fermeture de la maternité de Die (lire ici et encore ici). Vu le contexte et la colère des habitants, le décès a été très médiatisé. L’Agence régionale de santé (ARS) Auvergne-Rhône-Alpes a diligenté une enquête. Attendus depuis fin mars, les résultats ont été rendus publics le 7 juin. L’ARS s’est contentée d’un communiqué de presse, plutôt succinct, publié sur son site, après une conférence de presse étrangement donnée à guichets fermés. Seuls trois journalistes, choisis par l’ARS et la préfecture, ont pu y assister. Si elle a répondu à certaines questions, l’ARS a refusé de communiquer le rapport détaillé, qui a pourtant été anonymisé à cette fin. Ce rapport, que nous avons pu nous procurer et que nous avons corroboré par plusieurs témoignages, est pourtant riche d’enseignements. Il révèle une série de dysfonctionnements dans la prise en charge de la mère, tout au long de la grossesse et le jour du décès d’Aimé. Urgence vitale Ce lundi 18 février, en fin de journée, Céline se sent mal puis commence à saigner. Surtout, elle ne sent plus son bébé bouger. Inquiet, Fabrice Martinez, son conjoint, finit par téléphoner aux urgences, via le 18. Il est 20h. La nuit est noire et les sages-femmes du Centre périnatal de proximité (CPP) ont déjà rejoint leur domicile. Les pompiers prennent contact avec le 15 et le médecin régulateur du Samu de l’hôpital de Valence, dont dépend le CPP de Die, rappelle le père. Quelques minutes après, les sapeurs-pompiers du petit village de Châtillon-en-Diois, tous […]

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À Privas, la maternité va fermer

À Privas, en Ardèche, la maternité va fermer. À moins d’un coup de théâtre, les femmes ne devraient plus accoucher dans ce service du Centre hospitalier des Vals d’Ardèche (CHVA) à partir du 1er août 2019. À la place, un Centre périnatal de proximité (CPP) devrait ouvrir ses portes, même si l’ARS Auvergne-Rhône-Alpes refuse encore de le reconnaître. Mais avant cela, l’équipe doit traverser les affres de la mutation et le deuil de sa maternité. Sans aucun dialogue avec leur tutelle, les professionnels de la maternité sont en souffrance. Sous couvert d’anonymat, plusieurs d’entre eux, à qui l’on a interdit de communiquer sur le sujet, ont accepté de témoigner. Des accouchements en baisse Depuis de longues années, la maternité se trouve sous la barre fatidique des 300 accouchements par an, seuil fixé par le décret de périnatalité de 1998 en deçà duquel les maternités doivent être fermées, sauf exception géographique. Le nombre d’accouchements a progressivement baissé, passant de 263 en 2014 à 183 en 2018. Sur les 5 premiers mois de cette année, seuls 56 accouchements ont eu lieu. « Les patientes savent que la maternité est sur la sellette. Elles nous ont désertés. Elles ne supportent pas cette incertitude. Les multipares continuent à accoucher chez nous, mais les primipares prennent peur. » La maternité de Privas est dans le collimateur des autorités sanitaires depuis plusieurs années. Dès 2017, la Cour des comptes préconisait sa transformation en CPP. Dans un rapport de la Chambre régionale des comptes d’Auvergne-Rhône-Alpes, rendu public début 2017, qui porte sur l’analyse des exercices du CHVA de 2010 à 2014, les auteurs soulignent que l’hôpital « dessert un bassin de population étendu mais faiblement peuplé (50 000 habitants), rural et vieillissant. (…) Privas se situe à 35 minutes des maternités de Valence (35 km), 41 minutes de celle de Montélimar […]

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Maternité de Die. Après la fermeture

Pendant des années, on n’avait aucun projet, sauf attendre une éventuelle fermeture, raconte l’auxiliaire de puériculture Élodie Borel. Ouvrir le CPP [Centre périnatal de proximité, ndlr] a été angoissant, mais aussi très stimulant. » Globalement, après les affres des dernières années de fonctionnement et le deuil de la maternité (Lire ici), l’équipe semble épanouie. Rapide, la transition a été difficile, mais très accompagnée par l’équipe de Valence. Après plus d’un an de recul, les plâtres ont été essuyés. Un bilan a même été dressé. Avec des surprises : si le fonctionnement global de la structure et les différents risques liés au déplacement de l’accouchement dans une maternité plus éloignée ont été anticipés, les femmes ne suivent pas toutes la voie tracée par les professionnels. UN AUTRE LIEN AUX PATIENTES « L’information que la maternité avait fermé a très bien circulé. Mais ça n’a pas été de même pour l’ouverture du CPP », regrette la sage-femme Nadine Billy. La fréquentation du centre est restée faible pendant le premier trimestre 2018. Au total, sur l’année 2018, « il y a eu 3042 consultations, pour une file active de 1125 personnes, dit Sabrina Bottet. C’est beaucoup. » Sage-femme coordonnatrice de la maternité de Valence, 20 % de son temps de travail est dédié au CPP de Die. « Pas mal de choses ont été mises en place au niveau du suivi des grossesses, explique la sage-femme Agnès Juvin. L’offre du CPP est supérieure à celle de notre ancienne maternité. Nous assurons aussi des consultations de gynécologie, ce que nous ne faisions pas avant. Aujourd’hui, je vois la femme dans toute sa problématique. Cela favorise le lien. » Un sentiment partagé par l’auxiliaire de puériculture Élodie Borel : « À la maternité, on créait des liens très forts, mais on ne voyait pas les […]

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Maternité de Die : chronique d’une fermeture annoncée

« Quand j’ai postulé à la maternité en 1986, le directeur de l’hôpital m’a appelée pour me prévenir que le service allait fermer, raconte Agnès Juvin, qui fait désormais office de sage-femme coordinatrice au Centre périnatal de proximité (CPP) de Die. J’étais jeune, j’avais envie de bouger, même si ce n’était que pour deux mois. Alors je suis venue. J’ai pris mon poste en novembre 1986. » La maternité a fermé ses portes le 29 décembre 2017, plus de 33 ans après cette première annonce. Aujourd’hui, la sage-femme compte parmi les anciennes de l’équipe. Elle a mené l’essentiel de sa carrière dans la plus petite maternité de France métropolitaine. En 2016, 117 bébés y sont nés. Pour les habitants, fortement mobilisés, la fermeture de la maternité jouait donc l’arlésienne depuis plus de trois décennies. Si bien que la confirmation de l’événement a fait l’effet d’un coup de massue, la décision de non certification de l’hôpital, rendue par la HAS en octobre 2017, ayant peu été médiatisée. Sur place, l’équipe apprend la nouvelle par voie de presse. « Fin novembre 2017, nous savions qu’il y avait une réunion à l’ARS avec plusieurs élus et qu’une conférence de presse était prévue ensuite, raconte l’auxiliaire de puériculture Élodie Borel. En début d’après-midi, j’ai cherché l’info sur France Bleu et j’ai vu que le couperet était tombé. Ça m’a fait un choc. J’ai prévenu le reste de l’équipe. Ensuite, ça a été le silence radio. Personne. Le désert. Pas un seul cadre n’est venu. Aucune nouvelle de l’administration. Puis, nous avons reçu un appel téléphonique de la sage-femme coordonnatrice de Valence. » L’équipe n’a qu’un gros mois pour transformer la maternité en CPP. EXCEPTION GÉOGRAPHIQUE ? L’exception géographique qui a contribué à maintenir cette petite maternité si longtemps n’a donc pas suffi. Pourtant, la […]