« C’est la grosse galère », témoigne une sage-femme de la maternité de l’Hôpital intercommunal André Grégoire, à Montreuil. En Seine-Saint-Denis (93), où les services de réanimation sont déjà saturés, plusieurs maternités sont en train de se spécialiser dans l’accueil des patientes Covid. À Montreuil, il a fallu pousser les murs et revoir toute l’organisation. En urgence.
POUSSER LES MURS
« Des femmes enceintes près du terme, malades du Covid-19, sont transférées ici, poursuit la sage-femme. Elles viennent de tout le département. Avant, on avait 4 ailes en suites de couches. On en a fermé 2. À la place, on a ouvert une aile Covid +, mais elle est déjà pleine, avec des femmes enceintes et des femmes en post-partum. Du coup, le service réservé aux grossesses à haut risque (GHR) a été transféré dans une des ailes précédemment utilisées en suite de couches et le service GHR est lui-même devenu un service Covid +. Désormais, la maternité n’accueille plus que des femmes Covid + et des femmes qui ont des grossesses à risque. Toutes les autres femmes sont envoyées dans d’autres établissements. Le service de pédiatrie est également en train de fermer pour devenir un service de suite de couches dédié aux femmes Covid +. »
« Pour faire face à tout ça, nous avons besoin de renfort, souligne la sage-femme. Nous devons ajouter des sages-femmes dans le service de pédiatrie et aussi pour assurer les transferts. Toutes les sages-femmes qui étaient en vacances ont été rappelées et la direction rappelle également toutes les sages-femmes qui ont, un jour ou l’autre, travaillé à la maternité au cours de ces dernières années. »
Le transfert des femmes enceintes qui vont bien vers d’autres établissements semble se faire dans l’urgence. Il n’y a par exemple pas d’anticipation pour orienter aussi les suivis de grossesse des femmes qui pourraient, plus tard, accoucher ailleurs. Quand le bateau prend l’eau, on colmate d’abord les principales brèches. Pour l’heure, toutes les femmes qui accouchent à Montreuil doivent sortir à J2, même celles qui ont été césarisées. Les sages-femmes de PMI et les libérales qui continuent de travailler sont mises à contribution pour le suivi à domicile. « Administrativement, les Prado ne sont plus organisés, mais on contacte encore la personne qui organise habituellement le Prado pour trouver les relais en ville », explique la sage-femme.
PÉNURIE DE MATÉRIEL
« À l’hôpital, nous avons un site internet pour les téléconsultations, poursuit-elle. Toutes les consultations de grossesse se font maintenant par téléconsultation, sauf la première et celles des femmes dont le terme est supérieur à 35 SA. Nous recevons ces femmes en consultation. Chaque sage-femme reçoit deux masques chirurgicaux le matin, quand elle arrive, pour toute la journée. Mais nous n’avons plus de gel hydroalcoolique. J’ai aussi apporté mon propre matériel pour désinfecter. Et ce midi, on a volé les dix masques que j’avais en réserve dans mon bureau qui est pourtant constamment verrouillé par code ! Je n’ai pas de masque à donner aux patientes. Mais je n’ai reçu aucune femme qui toussait. »
À la maternité, même si l’équipe de terrain est soudée, tout le monde est stressé. Par ailleurs, le service de réanimation est quasiment plein et plus aucun respirateur n’est disponible. Même au téléphone, l’angoisse est palpable. Le problème, c’est qu’il va falloir tenir dans la durée.