Entretien : « Les parents déficients intellectuels sont d’abord des parents »

Bertrand Coppin, éducateur spécialisé et psychologue, est membre du laboratoire Parentalité avec une déficience intellectuelle (Padi), qui a mené plusieurs études sur ce thème. Il dirige l’Institut régional du travail social du Nord-Pas-de-Calais.

Combien d’enfants sont nés 
de parents avec une déficience intellectuelle ?
 Une seule étude à visée épidémiologique menée en 1995 par l’Unapei (Union nationale des associations de parents et amis de personnes handicapées mentales) recensait 13 000 enfants nés d’un parent avec une déficience intellectuelle (Padi). Depuis les années 1990-2000, nous constatons une augmentation exponentielle de ces parentalités. On peut dire qu’aujourd’hui, plusieurs dizaines de milliers d’enfants ont un parent dans cette situation, malgré l’absence de chiffres officiels. Au niveau politique et juridique, nous sommes passés progressivement d’une ségrégation des personnes handicapées à une volonté d’intégration. Les lois de 1975, 2002 et 2005 ont renforcé leurs droits. Les citoyens côtoient plus souvent des personnes atteintes de déficiences intellectuelles intégrées en milieu ouvert. Même si une méfiance perdure à leur égard, ces personnes apparaissent moins étranges. De leur côté, les institutions ont mis l’accent sur l’autonomie et l’épanouissement. Leurs compétences étant valorisées, ces personnes revendiquent de vivre « comme tout le monde ». Le désir d’enfant s’inscrit dans cette logique. Ce phénomène suscite des craintes concernant le devenir des enfants. Que disent les études ? La plupart des études ont été menées à l’international, dans des contextes différents et non extrapolables. Comme elles sont rares, cela laisse libre courts aux discours affirmant que les parents handicapés ne devraient pas avoir d’enfant. En 2005, le laboratoire Padi amené une étude auprès de 144 services d’accompagnement à la vie sociale (SAVS) de France auprès de familles où au moins un des parents avait une déficience légère reconnue. Elle incluait 1060 enfants : 83 % ne présentaient aucun handicap. Cela signifie que 17 % avaient une déficience, un taux supérieur à ce qu’on observe ordinairement. Mais cela va à l’encontre du préjugé qui veut que tous les enfants nés de Padi naissent également déficients….

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