Année : 2024
L’utérus artificiel : une révolution dans la reproduction d’ici 2040 ?
Dans un avenir proche, peut-être dès 2040, la technologie de l’utérus artificiel pourrait transformer radicalement la reproduction humaine, prédit Rhiannon Jones. Cette innovation permettant de faire grandir des bébés en dehors du corps humain soulève des questions profondes d’ordre moral, pratique, juridique et logistique. Une révolution proche Une telle prédiction peut sembler audacieuse, mais elle repose sur des avancées scientifiques déjà en cours (voir Profession Sage-femme n° 298). Si obstacle il y a, il ne sera pas technologique, mais financier, prévoit Rhiannon Jones. Car lorsque l’investissement est là, les choses vont très vite, ajoute-t-elle, citant l’exemple d’Elon Musk avec SpaceX et Tesla. Les principaux défis seront d’attirer les financements nécessaires pour soutenir la recherche et l’innovation, ainsi que de surmonter les réticences sociales liées à cette révolution. L’impact sur les femmes et la société L’utérus artificiel sera vraisemblablement d’abord réservé aux élites fortunées avant de se démocratiser. Il pourrait se substituer dans un premier temps à la gestation pour autrui (GPA), autorisée dans de nombreux États américains. Certains futurs parents préféreront confier la gestation de leur enfant à une machine plutôt qu’à une autre femme, renforçant ainsi leur contrôle sur le développement du bébé. Cette technologie réduira également les débats juridiques complexes comme ceux autour du droit à l’avortement dans les cas de la GPA. L’utérus artificiel deviendra à terme accessible à un public plus large. Des changements sociétaux profonds en résulteront, notamment dans la manière dont nous concevons la naissance et la parentalité....
À Zweisimmen, les sages-femmes gèrent une maternité en coopérative
Accoucher à plusieurs heures de route, voilà à quoi étaient condamnées les habitantes des vallées entourant Zweisimmen en Suisse. Entre le Simmental et le Saaneland, ce territoire rural et agricole où l’on trouve également quelques stations de ski, a perdu sa maternité en 2015. Une décision qui venait aggraver la situation de ce désert médical et gynécologique. Anne Speiser, élue du canton de Berne, se souvient de ces moments difficiles et du sentiment d’urgence qui a saisi les citoyens et citoyennes : « Très vite, nous avons décidé de créer une alternative », explique-t-elle. En 2017, la maternité Alpine était née, sur le modèle des maisons de naissance, mais avec une gouvernance partagée en coopérative. Une innovation peu commune dans le domaine de la santé que l’on doit à la culture locale : « Le territoire est habitué à créer des coopératives agricoles, montagnardes, pour faire du fromage ou gérer les routes », donne en exemple l’élue, également présidente de la structure.En sept ans, près de 400 bébés sont nés dans la grande maison en bois, en forme de chalet où se trouve la maternité Alpine. Susanne Reber, sage-femme en chef est arrivée en 2020. Passionnée par son métier, elle en avait perdu le sens en travaillant dans un grand hôpital au centre du pays : « Ici le focus est sur l’accouchement physiologique, c’était nouveau, je n’avais jamais travaillé dans ce type de structure », précise-telle. 75 % des sages-femmes qui travaillent à la maternité Alpine viennent de grandes villes. Beaucoup habitent à Berne, située à plus d’une heure et résident dans un appartement partagé lors de leurs gardes à Zweisimmen.Ce succès de recrutement s’explique par une forte solidarité entre collègues et un management bienveillant. Les sages-femmes y ont aussi une grande autonomie et une pluralité de tâches, moins...
Les compétences vaccinales des sages-femmes
Les prérogatives des sages-femmes évoluent depuis plusieurs années et leur rôle dans la prise en charge globale de la population est de plus en plus consistant. Reflet de cette évolution, leurs compétences vaccinales sont régulièrement étendues. Les textes s’ajoutent aux textes et l’ensemble avait besoin d’une simplification – la question récente de la vaccination contre le VRS, qui n’était pas accessible aux sages-femmes faute de figurer au calendrier vaccinal, en est une bonne illustration. C’est chose faite depuis l’arrêté de 2023, venu simplifier les textes applicables et étendre à d’autres professionnels de santé la possibilité de prescrire et d’administrer les vaccins, le but étant d’étendre la couverture vaccinale des Français et d’améliorer la protection des plus jeunes. Une compétence globale liée au calendrier vaccinal depuis 2023 Depuis août 2023, les sages-femmes, les infirmiers, les pharmaciens, ainsi que certains professionnels de santé travaillant dans des laboratoires d’analyses médicales, peuvent vacciner tout ou partie de la population avec les vaccins figurant dans le calendrier vaccinal. Les sages-femmes sont maintenant autorisées à prescrire et administrer à toutes les personnes (quel que soit leur âge) les vaccins obligatoires et recommandés mentionnés au calendrier des vaccinations en vigueur.(arrêté du 8 août 2023 fixant la liste des vaccins que certains professionnels de santé et étudiants sont autorisés à prescrire ou administrer et la liste des personnes pouvant en bénéficier en application des articles L. 4311-1, L. 4151-2, L. 5125-1-1 A, L. 5126-1, L. 6212-3 et L. 6153-5 du Code de la santé publique)....
Trouver son équilibre, pour être une sage-femme épanouie
Pourquoi sage-femme ? Ce n’était pas ma première vocation. Quand j’étais vraiment petite, je voulais être clown, pour faire rire les gens. Ma soeur et mon frère me le rappellent régulièrement pour se moquer de moi. Ensuite, c’est resté flou dans ma tête assez longtemps. Vétérinaire, pédiatre, kinésithérapeute…Une chose était sûre tout de même, je voulais travailler dans le soin. Ma soeur a été ma conseillère d’orientation : « Sage-femme, c’est mignon, tu travailleras avec les femmes enceintes et les bébés ». C’est comme ça qu’elle voyait le métier ! J’ai bien fait de l’écouter, sagefemme est un métier qui m’épanouit chaque jour. J’ai fait mes études à Saint-Antoine à Paris, dont je suis sortie diplômée en 2012. À l’époque, presque tout le monde allait travailler à l’hôpital en sortant de l’école. Les études étaient très tournées vers la salle de naissance. Par exemple, je n’ai fait que deux stages courts d’une semaine en libéral, sur cinq ans d’études. Je projetais de rester une dizaine d’années à l’hôpital. À la sortie de l’école, j’ai été embauchée à la maternité Saint-Joseph en contrat à durée déterminée (CDD). Il y avait très peu de contrats à durée indéterminée (CDI) en ce temps-là. Pendant les deux ans où j’ai travaillé, j’ai dû enchainer vingt CDD d’un, deux ou trois mois. Je n’étais pas la seule concernée, toute ma promotion a beaucoup galéré pour décrocher un CDI. C’est par le bouche-à-oreille que j’ai appris qu’un cabinet se libérait rue du Cherche-Midi. La sagefemme qui l’occupait était sur le point de déménager à l’étranger. J’avais justement fait un remplacement en libéral cet été-là, qui m’avait beaucoup plu. J’ai un peu hésité, beaucoup réfléchi, puis j’ai sauté le pas. Je ne l’ai jamais regretté ! Le libéral me va comme un gant....
Autopalpation mammaire : pourquoi trop de femmes ne la font pas ?
Depuis quand encourage-t-on les femmes à s’auto-inspecter les seins ? La première documentationencourageant l’autoexamen des seins daterait de 1947, lorsque le docteur A. M. Popma et la Idaho Division of the American Cancer Society ont pris l’initiative de créer et diffuser un film sur le protocole d’autopalpation à travers tous les États-Unis.Les médecins avaient alors mesuré que dans 98 % des cas de cancer du sein, les patientes elles-mêmes s’étaient rendu compte que quelque chose n’allait pas, ce constat les poussant à consulter. La pratique de l’autoexamen de la poitrine a ainsi été considérée comme l’une des techniques permettant de détecter précocement un éventuel cancer du sein.Depuis, des campagnes pédagogiques et de prévention autour de l’autopalpation ont vu le jour dans de nombreux pays, mettant en lumière cette pratique. L’apparition d’Octobre rose, en 1985, aux États-Unis, a également largement contribué à la prévention autour des cancers du sein. Ce concept est arrivé en France en 1994, célébrant ses 30 ans cette année. L’objectif de cette campagne mondiale est de dépister précocement les cancers du sein afin d’améliorer le taux de survie à la maladie. État des lieux de l’autopalpation en France Près d’une femme sur huit est touchée par un cancer du sein au cours de sa vie. Et la France comporte le plus haut taux d’incidence de cancer du sein au monde, avec 105,4 cas recensés pour 100 000 personnes en 2022, selon l’Organisation mondiale de la santé. Mais également un taux de mortalité bas, avec 15,8 décès sur 100 000 personnes.Cette prévalence particulièrement importante du nombre de cancers devrait aller dans le sens d’une prévention poussée auprès des femmes, notamment en ce qui concerne l’autoexamen des seins. Pourtant, selon un sondage Ifop et Gleeden mené en 2021, 60 % des Françaises ne savent pas comment faire une autopalpation...
Les limites juridiques à la PMA en France
La PMA (procréation médicalement assistée) ou AMP (assistance médicale à la procréation) désigne l’ensemble des techniques médicales permettant de concevoir un enfant lorsque la conception naturelle est difficile, voire impossible.Elle englobe différentes techniques : Jusqu’en 2021, la PMA n’était autorisée en France que pour les couples hétérosexuels (mariés, pacsés ou en concubinage depuis au moins deux ans), en âge de procréer et présentant une infertilité pathologique médicalement constatée ou risquant de transmettre une maladie grave à leur enfant. La révision de la loi de bioéthique, la troisième depuis 1994, a modifié ces règles. La loi du 2 août 2021 relative à la bioéthique a élargi la procréation médicalement assistée à toutes les femmes qui ont un projet parental, aux couples homosexuels comme aux célibataires (le critère médical d’infertilité qui conditionnait l’accès à la PMA a donc été supprimé). Cette nouvelle loi a également ouvert aux femmes la possibilité de congeler leurs ovocytes, sans motif médical, pour préserver leur possibilité de devenir mère, ce qui n’était pas autorisé en France auparavant (excepté pour des raisons médicales). La vitrification ovocytaire est ouverte à toutes les femmes entre 29 et 37 ans et, même si les délais peuvent être longs, cette démarche est gratuite, car prise en charge par la Sécurité sociale. La loi autorise également désormais le recours au double don de gamètes (ovocytes et spermatozoïdes). Les couples dont les deux membres sont stériles peuvent désormais avoir recours à la PMA. Ces évolutions majeures ont soulevé de nombreux débats, politiques, scientifiques et éthiques. Des limites à la PMA demeurent, éthiques notamment, pratiques également, qui viennent encadrer les procédures de PMA et peuvent conduire certains « parents d’intention » à se rendre dans des pays étrangers dans lesquels ces limites n’existent pas....
Geneviève Darrieussecq, nouvelle ministre de la Santé et de l’Accès aux soins
Après cinq mois d’exercice, Frédéric Valletoux, ministre délégué à la Santé va céder la place à Geneviève Darrieussecq qui devient donc la huitième ministre de la Santé sous la présidence d’Emmanuel Macron. Membre du parti MoDem, cette ancienne médecin allergologue connaît déjà en partie la maison, pour avoir été ministre déléguée chargée des Personnes handicapées auprès du ministre de la Santé François Braun, dans le gouvernement d’Elisabeth Borne. Elle a par ailleurs une longue expérience des affaires publiques. Des dossiers majeurs Crise de l’hôpital public, urgences en tension, périnatalité, financement de la Sécurité sociale, loi sur la fin de vie, gestion des Ehpad, santé mentale, pénuries de médicaments, déserts médicaux, refonte de l’Aide médicale d’État, etc. Tous les dossiers dont hérite Geneviève Darrieussec sont brûlants. Elle devra notamment décider de l’avenir des petites maternités, trouver un équilibre entre la préservation du réseau de proximité et la rationalisation de l’offre de soins face à la pénurie de professionnels de santé (lire le compte-rendu du rapport de la mission sénatoriale sur l’avenir de la santé périnatale page 14). Pas de miracles en vue Les marges de manoeuvre de la nouvelle ministre seront réduites, avec un déficit des comptes de la Sécurité sociale qui devrait dépasser seize milliards d’euros cette année. « Hors de contrôle », a même alerté la Cour des comptes. « Je ne ferai pas de miracles, je ne suis pas une fée », a prévenu Geneviève Darrieussecq, lors de la passation de pouvoir au ministère de la Santé. Les enveloppes « augmenteront un peu », mais « jamais à la hauteur de ce que tout le monde espérerait ». Réputée discrète, la nouvelle venue saura-t-elle imposer une vision d’avenir et défendre ses vues face à Bercy ?...
Être au coeur de l’humain, quoi de plus passionnant ?
Pouvez-vous vous présenter et nous raconter comment vous êtes devenue sage-femme ? J’ai 53 ans et je suis sage-femme depuis 1995. J’ai eu un parcours scolaire tortueux, impacté par ma vie familiale. Le climat difficile à la maison m’a conduite à un redoublement et une orientation vers un BEP sanitaire et social qui m’a permis d’effectuer des stages dans les hôpitaux. Mais tout mal à son bien, car l’expérience a été décisive. Alors que ma première idée était d’être éducatrice de jeunes enfants, j’ai compris que je faisais fausse route grâce à l’un de ces stages. Et c’est encore à l’occasion d’un stage que j’ai découvert le métier de sage-femme. La révélation ! Dès lors, j’ai entrepris de raccrocher les wagons manquants en faisant un bac technologique, puis une année de préparation au concours d’entrée (à l’époque ce n’était pas encore la première année de médecine à valider).Ensuite je suis partie pour quatre ans d’études à Bourg-en-Bresse dans l’Ain. C’était difficile et passionnant à la fois. On était en stage la nuit et on devait se reposer le matin. L’après-midi, on retournait en cours. C’était intense, mais j’ai adoré ces études parce qu’elles étaient très cliniques. Pensez donc, j’ai réalisé un accouchement dès le premier jour de stage de ma première année ! À quatre mains, bien sûr, avec une sage-femme, mais quand même, vous imaginez ?Et puis nous étions très soudées dans la promotion, des liens d’amitié forts sont nés pendant ces années-là et ont perduré jusqu’à aujourd’hui ! Mon rêve ? Travailler à l’hôpital ! Je n’envisageais pas de commencer ma carrière sans passer par la salle d’accouchement. Je voulais travailler à l’hôpital. J’ai été exaucée, puisque j’y suis restée 22 ans. J’avais deux jours de diplôme en poche quand j’ai débuté à Paris, en 1995. Ayant fait...
Santé environnementale : des ateliers en plein essor
« On peut être acteur sur notre santé. En revanche, il y a des choses que l’on subit. Lesquelles selon vous ? » C’est autour de cette réflexion, lancée par Marie Leguen, que débute l’un des tout premiers ateliers Santé Environnement du CHU de Rennes (Ille-et-Vilaine). Juchées chacune sur un ballon de grossesse, Lamiia, Fatou, Solenn et Marlène réfléchissent un peu avant de répondre à la sage-femme.« L’eau qu’on consomme ? », tente l’une des trentenaires, dans l’ambiance feutrée de la salle de préparation à la naissance en cet après-midi de septembre. Marie Leguen corrige et complète : « Notre âge, notre patrimoine génétique… Et sur quoi peut-on agir ? » Assez vite, les quatre participantes listent d’ellesmêmes ce qui sera le programme de cet atelier bimensuel : l’alimentation, l’air intérieur, les produits ménagers, les cosmétiques… Objectifs de ces deux heures ? Apprendre aux parents et jeunes parents à reconnaître les polluants dans leur environnement et à les limiter. « Un polluant en moins, c’est une chance en plus d’être en meilleure santé », formule Marie Leguen avant d’égrener les risques associés à court, moyen et long terme, comme les cancers, les maladies chroniques ou la diminution de la fertilité. « Les femmes sont plus réceptives » Pour la sage-femme, la grossesse est le moment opportun pour aborder ces questions : « Les 1 000 premiers jours, c’est-à-dire de la conception aux 2 ans de l’enfant, sont une période de grande vulnérabilité, rappelle cette professionnelle, arrivée au CHU dès l’obtention de son diplôme en 2005. C’est aussi un moment hors du temps où l’on voit souvent les femmes et où elles sont plus réceptives, donc davantage susceptibles de changer leurs habitudes. » Marlène, enceinte et aussi sage-femme au CHU, résume : « Comme ça passe par ton corps, tu fais...