
Dans les bidonvilles parisiens
Debout devant sa cabane, Isabella* conserve un sourire triste. Oui, elle se sent bien. Non, cette semaine, elle n’a pas eu de contraction. C’est vrai, la veille, elle n’a pas été reçue en consultation à l’hôpital. Elle s’y est pourtant bien rendue, mais on lui a répondu qu’elle n’avait pas de rendez-vous. Coutumiers de ces couacs, les bénévoles de l’association parisienne Agir pour la santé des femmes (ADSF) ne s’en étonnent même plus. Depuis quatre mois, ils rendent régulièrement visite aux femmes de ce camp rrom de Saint-Denis (93), en lisière de Paris, à deux minutes à pied d’une station de métro. Objectif principal : assurer un suivi de grossesse minimal, en incitant et accompagnant les patientes à rejoindre le droit commun. A chacune de ses maraudes, l’association compte trois bénévoles : une sage-femme, un gynécologue ou une infirmière puéricultrice, ainsi qu’un travailleur social et un logisticien. Dans ces bidonvilles, les besoins des femmes et des enfants sont énormes. « Sans nous, la grossesse de cette femme ne serait pas suivie », chuchote Karine Renaudie, infirmière puéricultrice présente ce jour de fin juillet devant la baraque d’Isabella. « Médecine de brousse » Après quelques minutes d’échanges avec la patiente, la sage-femme Julia Bouyssou s’inquiète : Isabella se plaint d’un prurit généralisé. A-t-elle aussi des maux de tête ? Voit-elle des points blancs ? Souffre-t-elle de douleurs en haut du ventre ? Et surtout : serait-elle d’accord pour être auscultée ? Isabella invite les bénévoles à l’intérieur de son logement. Après avoir pris sa tension, la sage-femme sort de son sac à main une petite trousse, puis utilise un outil emblématique de sa profession, dont l’usage a quasiment disparu en France : un stéthoscope de Pinard. Couplé à son sens clinique, ce qu’elle entend et observe la rassure. Le bébé bouge bien. Elle insiste néanmoins pour qu’Isabella se rende rapidement aux urgences obstétricales...