Alcoolisation fœtale : au moins un nouveau-né trinque chaque jour

Pour la première fois, une étude de Santé publique France a répertorié les troubles liés à l’alcoolisation fœtale repérés en période néonatale. Entre 2006 et 2013, au moins 3000 cas ont été enregistrés, soit un par jour. Décryptage.

3207 nouveau-nés ont été dépistés avec un syndrome d’alcoolisation fœtale (SAF) ou une affection en lien avec l’alcoolisation maternelle entre 2006 et 2013. Il s’agit d’estimations de Santé publique France (SPF), qui a sonné l’alarme en marge du 9 septembre, Journée mondiale du syndrome d’alcoolisation fœtale. Jusqu’ici, aucune étude nationale n’avait évalué l’incidence et l’impact de l’alcoolisation fœtale à la naissance.

L’étude souligne qu’au moins un enfant naîtrait ainsi chaque jour avec des séquelles liées à son exposition à l’alcool in utero. En réalité, bien plus d’enfants sont concernés, les troubles allant des formes sévères de SAF à des problèmes neuro-développementaux non repérables à la naissance.

 

Premières estimations

Les chercheurs ont travaillé à partir des données du Programme de médicalisation des systèmes d’information en médecine, chirurgie et obstétrique (PMSI-MCO), pour toute la France, hors Mayotte. Seules les hospitalisations survenues entre la naissance et les 28 premiers jours de vie ont été retenues. À plus de 90 %, les cotations étaient effectuées à la naissance et dans 3,4 % des cas au-delà de deux jours après l’accouchement. Entre 2006 et 2013, un codage de SAF a été posé pour 452 nouveau-nés, soit une incidence de 0,07 pour 1000 naissances vivantes. Durant la même période, l’étude relève 2755 codages de « fœtus et nouveaunés affectés par l’alcoolisme de la mère », nommés « autre cause de l’alcoolisation fœtale (aCAF) » dans l’étude, soit une incidence de 0,41 pour 1000. Au total, les chercheurs évaluent l’incidence des troubles liés à l’alcoolisation fœtale (TCAF) à la naissance à 0,49 pour 1000 naissances vivantes.

Pour aller plus loin, l’analyse a cherché à identifier d’éventuelles évolutions des diagnostics dans le temps. Entre les périodes 2006-2009 et 2010-2013, les codages de SAF ont diminué de façon significative. À l’inverse, entre ces deux périodes, les codages d’autres troubles associés à l’alcoolisation fœtale ont augmenté. Est-ce dû à des modifications des pratiques de repérage ou à une évolution des comportements des femmes enceintes ? Les chercheurs affirment n’avoir aucun élément pour trancher.

Autre enseignement : quatre régions semblent davantage touchées. L’incidence des TCAF est plus élevée que la moyenne à La Réunion, en Haute-Normandie, Champagne-Ardenne et Nord-Pas-de-Calais. Ces résultats confirment une étude de l’Inserm de 2001 qui relevait déjà une incidence plus élevée de SAF sur l’île de La Réunion, dans le Nord-Pas-de-Calais et en Normandie. D’autres études mentionnaient d’autres régions à forte incidence de SAF. Les chercheurs émettent plusieurs hypothèses pour expliquer ces disparités. Au niveau sociologique et culturel, l’alcoolisation maternelle serait plus élevée dans certaines régions. Côté médical, certaines régions ont des pratiques plus avancées de repérage, de diagnostic et de codage des troubles.