Faut-il dépister le CMV ?

Malgré sa potentielle gravité pour le fœtus, le cytomégalovirus n’est pas systématiquement recherché chez les femmes enceintes. Avec un traitement efficace et un coût économique intéressant, il faudrait peut-être revoir les recommandations.

Chez le fœtus, une infection à cytomégalovirus (CMV) peut se révéler dramatique : RCIU,
ictère, thrombopénie, pneumopathie, nombreuses atteintes cérébrales, décès. Selon le Haut Conseil de la santé publique (HCSP), le dépistage pendant la grossesse n’est pas recommandé. Pourtant, avec l’arrivée d’un traitement efficace, il faudrait peut-être revoir la copie. Lors d’une journée organisée par le Groupe de recherche sur les infections pendant la grossesse (Grig) à l’occasion du rassemblement Paris Santé Femmes, qui s’est tenu en mai dernier, plusieurs spécialistes ont présenté leurs arguments, étayés par de récents travaux scientifiques.

« Il est temps de dépister les infections à CMV », déclarait Olivier Picone, gynécologue-obstétricien à l’hôpital Louis-Mourier, à Colombes, en région parisienne, et président du Grig. « C’est un problème fréquent, poursuivait-il. 0,4 % des enfants naissent infectés par le CMV. »

En moyenne, le taux de transmission materno-fœtale s’élève à 30 %. Une immense majorité (90 %) des enfants infectés vont être asymptomatiques à la naissance. Mais chez eux, entre 5 % et 10 % vont développer des troubles neurosensoriels pendant l’enfance. Si la surdité est bien connue, l’oreille interne peut aussi être touchée : la cochlée comme le vestibule. En résultent des troubles de l’équilibre et du développement posturo-moteur. Plus grave, 10 % des enfants infectés pendant la vie fœtale vont naître symptomatiques. Si l’infection a eu lieu au cours du premier trimestre de la grossesse, cette proportion est plus élevée. Parmi eux, 10 % vont décéder, 10 % – parmi les moins symptomatiques à la naissance – vont connaître un développement quasi normal, 60 % vont présenter des séquelles plus graves.

L’hygiène avant tout

« La prévention primaire est simple, rappelait Olivier Picone. Le CMV est un virus fragile. Il suffit de se laver les mains avec du savon et le virus disparaît. » Dès la fin des années 1990, il y a eu des campagnes pour ne pas embrasser un enfant sur la bouche, ne pas manger avec ses ustensiles, bien se laver les mains, spécialement au moment des changes, du mouchage, de l’alimentation et du bain de l’enfant… Les crèches sont des lieux à haut risque : entre 23 % et 50 % des enfants excrètent du CMV. Un quart des femmes séronégatives qui viennent d’accoucher vont s’infecter au cours des deux premières années, quand leur enfant sera en crèche. Plusieurs études ont aussi montré que la séroconversion des femmes enceintes diminuait fortement après des conseils d’hygiène. Et dans l’immense majorité des cas, ces mesures sont acceptables.

Un traitement efficace

Aujourd’hui, certaines maternités dépistent systématiquement les femmes enceintes. Elles peuvent aussi être dépistées sur un signal d’appel, découvert à l’échographie. En cas d’observation d’anomalies évocatrices, seule la sérologie négative pourra exclure l’infection. « Dans 95 % des cas, l’interprétation sérologique du dépistage est assez facile, exposait le président du Grig. Le seul souci, minime, est qu’on ne peut pas diagnostiquer les infections secondaires. On ne sait pas si ce qui est dépisté résulte d’une réinfection ou d’une réactivation du virus. » Mais désormais, les médecins disposent d’une arme supplémentaire : le valaciclovir. « Depuis un peu plus d’un an, plusieurs études ont montré les résultats positifs de ce traitement antiviral, poursuivait le spécialiste. La prévention de la transmission materno-fœtale est efficace. Mis en place au cours du premier trimestre de la grossesse, le traitement peut diminuer de 70 % le taux de transmission materno-fœtale. Le délai de mise en route du traitement après l’infection paraît jouer un rôle clé pour prévenir la transmission. Par ailleurs, il y a une excellente tolérance maternelle au traitement. » Avec une précaution toutefois : quelques patientes ont développé une insuffisance rénale liée à l’antiviral. « Mais cette insuffisance rénale est réversible à l’arrêt du traitement, rassure Olivier Picone. Elle est connue des infectiologues, un peu moins des obstétriciens. Il faut bien hydrater les patientes, surveiller leur fonction rénale, et arrêter le traitement si un problème est décelé. » À ce jour, le traitement n’a pas d’effet indésirable sur le fœtus. 

Pour vérifier son efficacité, il faudra réaliser une amniocentèse plusieurs semaines après l’infection maternelle, le plus souvent vers 21 SA. Elle permettra un test PCR. Sa sensibilité est proche de 100 %, avec des faux négatifs exceptionnels. « La valeur prédictive de l’amniocentèse est fondamentale, soulignait l’obstétricien. L’amniocentèse négative est corrélée à un bon pronostic : soit le fœtus n’est pas infecté et il n’y aura pas de souci, soit il sera infecté plus tard. Mais comme le pronostic est corrélé au terme pour les formes neurologiques graves, on est rassuré. » En effet, les infections qui occasionnent les formes les plus graves surviennent au cours du premier trimestre de la grossesse. Les échographies de diagnostic ont également une forte valeur prédictive.

Sur un plan individuel, le dépistage du CMV paraît donc bien indiqué. Qu’en est-il en termes de santé publique et de finances ? Pour le savoir, Claire Périllaud-Dubois, du service de virologie de l’hôpital Paul-Brousse, en région parisienne, et de l’unité mixte de recherche « Infections, Antimicrobials, Modelling, Evolution », a réalisé une étude socio-économique. Les résultats sont surprenants : le dépistage systématique des futures mères, avec tous ses bénéfices, dont la mise en place d’un traitement, coûte moins cher que son absence ! En effet, dans le modèle sans aucun dépistage, celui préconisé par le HCSP, les enfants avec séquelles sont diagnostiqués plus tardivement. Chaque année, le coût des sérologies réalisées après la détection d’une anomalie échographique, celui des amniocentèses pour réaliser une PCR, celui des échographies de diagnostic, et celui des PCR réalisées chez les nouveau-nés s’élève à près de 6 millions d’euros. Si l’on ajoute à ce coût du diagnostic celui de la prise en charge et du suivi des enfants, le coût total de la maladie s’élève à 75 millions d’euros par an.

Mais « dans la vraie vie », entre 25 % et 50 % des femmes enceintes ont un dépistage au premier trimestre. Cela permet d’avoir un peu moins d’enfants avec séquelles : 93 au lieu de 169 chaque année. Le coût du dépistage et du diagnostic jusqu’à la naissance de l’enfant s’élève à 17 millions d’euros par an. Il présente cependant une inégalité entre les femmes et les enfants puisque certains ont accès au dépistage et d’autres non, en fonction de l’établissement choisi ou des pratiques des médecins et sages-femmes de ville. Dans la vraie vie, le coût total de la maladie s’élève quant à lui à 83 millions d’euros chaque année, « malgré les recommandations de ne pas dépister », appuie la scientifique. 

Vers de nouvelles recommandations ?

À 97 millions d’euros par an, le modèle qui prévoit le dépistage universel de toutes les femmes enceintes au cours du premier trimestre est plus cher. Il permet cependant de diagnostiquer 372 fœtus infectés, dont 93 auront des séquelles, et génère 100 IMG supplémentaires. Quand l’on ajoute à ce dépistage universel le traitement antiviral, le modèle devient vraiment intéressant. Dans ce dernier, le coût du dépistage et du diagnostic jusqu’à la naissance s’élève à 37 millions d’euros. Par rapport à « la vraie vie », ce modèle permet d’éviter 375 infections congénitales qui feraient suite à une primo-infection maternelle du premier trimestre, dont 159 enfants auraient eu des séquelles. Cette stratégie permet aussi d’éviter 40 IMG. Et dans ce modèle, le coût total de la maladie s’élève à 80 millions d’euros, contre 83 millions d’euros réellement déboursés actuellement. On s’y met quand ?

ν Géraldine Magnan

« C ’est le texte dont je suis le plus fière, bien que le sujet ne soit pas considéré comme “noble”, car la problématique concerne de très nombreuses femmes. » Ainsi s’est exprimée Marie-Victoire Sénat lors de la présentation du consensus formalisé d’experts sur la Prise en charge des nausées et vomissements gravidiques et de l’hyperémèse gravidique. L’avis du groupe d’experts, que la professeure de gynécologie-obstétrique de l’hôpital du Kremlin-Bicêtre a contribué à cordonner, a été détaillé lors des journées Paris Santé Femmes, en mai, à Paris. Les préconisations se concentrent surtout sur l’hyperémèse gravidique, soit le degré le plus sévère des nausées et vomissements. 

LA RECONNAISSANCE, ENFIN ! 

Ce consensus était très attendu par les représentantes d’usagers. Dès 2016, France Artzner, vice-présidente du Ciane et fondatrice de l’association 9 mois avec ma bassine, avait interpellé le Collège national des gynécologues et obstétriciens français. Elle demandait des recommandations pour la prise en charge de l’hyperémèse gravidique. « Nous espérions un tel texte, car l’hyperémèse n’était ni reconnue comme une pathologie ni définie jusqu’ici », témoigne aussi Audrey Tranchant, fondatrice de l’Association de lutte contre l’hyperémèse gravidique. Les deux représentantes ont d’ailleurs été associées au groupe de travail à l’origine du consensus. « Bien qu’il ne s’agisse pas de recommandations de bonnes pratiques, les nouvelles préconisations vont permettre d’améliorer les prises en charge », estime France Artzner.

Le CNGOF a en effet choisi de publier un consensus formalisé d’experts. La littérature manquait sur le sujet et les études retrouvées étaient de faible qualité scientifique pour prétendre à la publication de recommandations de bonnes pratiques, comme il est d’usage. « Le consensus formalisé d’experts permet de dire quelles sont les meilleures pratiques à proposer aux patientes, explique Loïc Sentilhes, chef du service de gynécologie-obstétrique au CHU de Bordeaux et coordinateur du groupe de travail. Le manque d’études sur les nausées, les vomissements et l’hyperémèse gravidiques est effarant. Cela constitue un véritable trou dans la recherche et un champ à investir. »

Malgré ces lacunes, le groupe de travail a recouru à la méthode Grade, consistant à analyser la littérature, déterminer la qualité des preuves disponibles puis à définir la force de chaque proposition. Dans un deuxième temps, les préconisations du groupe ont été soumises à 100 relecteurs selon la méthode Delphi à deux tours. 

DES CRITÈRES DÉFINIS

Les experts définissent les nausées et vomissements gravidiques comme « des nausées et vomissements débutant au premier trimestre de la grossesse en l’absence d’autre étiologie ». Surtout, ils proposent trois critères cliniques pour évaluer leur sévérité : la perte de poids rapportée au poids avant la grossesse, la recherche de signes cliniques de déshydratation et le score de PUQE (Pregnancy Unique Quantification of Emesis and nausea) modifié. Ainsi, les nausées et vomissements non compliqués correspondent à une perte de poids inférieure à 5 %, aucun signe de déshydratation et un score de PUQE inférieur à 6. Ces nausées et vomissements touchent 50 à 90 % des femmes enceintes. « Le plus souvent, les symptômes sont peu sévères, sans altération de la qualité de vie et disparaissent à la fin du premier trimestre, précise Philippe Deruelle, chef du service de gynécologie-obstétrique au CHU de Strasbourg. Ils ne nécessitent pas de bilan biologique ni d’échographie. »

Quant à l’hyperémèse gravidique, elle est définie par des nausées et vomissements associés à au moins un des critères suivants : une perte de poids supérieure ou égale à 5 %, un ou plusieurs signes de déshydratation et un score de PUQE supérieur ou égal à 7. Près de 35 % des femmes seraient concernées. Et dans 0,3 à 3,6 % des cas – selon les différentes études – les vomissements sont incoercibles et représentent la première cause d’hospitalisation au premier trimestre de la grossesse. 

« Le rôle des différents facteurs de risque est incertain, reconnaît Philippe Deruelle. Les études portent sur de faibles effectifs et rapportent des résultats contradictoires. » Des prédispositions génétiques, des facteurs biologiques, un faible indice de masse corporelle, un fœtus de sexe féminin, ou un faible état de santé général sont autant de facteurs de risques rapportés. L’hyperémèse comporte surtout des risques « probables » pour l’état de santé de la mère et du fœtus : petit poids de naissance, petit poids pour l’âge gestationnel et naissance prématurée. 

LA FIN DE L’APPROCHE PSY

Fait le plus marquant : le consensus d’experts remet radicalement en cause l’approche psychologisante de l’hyperémèse gravidique et son lot de mauvaises pratiques. Ces dernières s’inspirent de la prise en charge des troubles anorexiques, impliquant hospitalisation et extraction sociale. « De trop nombreux hôpitaux ont encore des protocoles d’isolement, dans le noir, de confiscation du téléphone et d’interdiction de visites, des pratiques qui n’ont pas lieu d’être », témoigne Luisa Attali, psychologue au CHU de Strasbourg et membre du groupe de travail (lire aussi p. 30). « Le principal intérêt de ce texte est de couper court à des idées reçues sur l’hyperémèse, estime France Artzner. Il va falloir continuer à les combattre cependant, le temps que les préconisations soient connues. »

Les experts sont très clairs et affirment qu’ « il n’y a aucune preuve d’une étiologie psychosomatique
ni aucune preuve en faveur d’une association entre hyperémèse gravidique et des traits caractéristiques de la personnalité »
. Ils ont en effet jugé que les études rapportant « la préexistence de troubles psychiques favorisant l’apparition de l’hyperémèse gravidique ou l’intégrant dans un ensemble plus global d’affections liées à l’oralité » relevaient d’une approche dogmatique, ne prenaient pas en compte des facteurs confondants et concluaient malgré la taille réduite des échantillons de population étudiés. 

En réalité, le stress, l’angoisse, voire les états de stress post-traumatique et les idées suicidaires sont la conséquence et non la cause de l’hyperémèse gravidique. Certaines femmes en arrivent même à envisager une IVG ou renoncent à des grossesses ultérieures tant leur calvaire est important (voir les témoignages en encadrés).

Lorsque les vomissements sont sévères et incoercibles, les femmes perdent du poids et s’affaiblissent physiquement. Elles ne tiennent souvent plus debout. Les symptômes se prolongeant, le moral en est forcément affecté. « Les femmes sont livrées à elles-mêmes alors qu’elles sont dans une grande souffrance, elles s’effondrent quand elles nous contactent, témoigne Audrey Tranchant. Souvent, elles s’interrogent sur elles-mêmes et se torturent, car on leur fait croire que c’est dans leur tête. Qu’on arrête de penser qu’elles ne sont pas matures ou qu’elles ne désiraient pas leur grossesse. Ces propos sont délétères. »
C’est pourquoi les experts jugent indispensable d’offrir la possibilité d’un soutien psychologique à toutes les patientes atteintes d’hyperémèse gravidique et d’informer les femmes de l’existence d’associations de patientes pour les accompagner. 

Concernant les nausées et vomissements peu compliqués, les experts ont étudié les traitements non médicamenteux dans un premier temps. Ils proposent que les femmes cessent de prendre des vitamines
prénatales ou toute supplémentation en fer, qui semblent aggraver les symptômes. La supplémentation folique peut être poursuivie seule. Les experts jugent aussi qu’aucune modification du régime alimentaire ou du mode de vie n’a prouvé son efficacité pour améliorer l’état des patientes. À elles d’adapter leur hygiène et leur alimentation selon leur ressenti. La prise de gingembre, de vitamine B6 ou encore l’acupression sont à réserver aux femmes avec un score de PUQE inférieur ou égal à 6, car il n’est pas prouvé que ces traitements améliorent les symptômes. L’aromathérapie n’est quant à elle pas conseillée, faute de preuve de son efficacité et en raison des risques associés à la prise d’huiles essentielles.

Dans les situations peu compliquées, les données concernant les traitements antiémétiques sont peu nombreuses et de faible qualité et ne permettent pas d’affirmer la supériorité d’une molécule par rapport à une autre. Les experts ont donc tranché et proposent en première, deuxième ou troisième
intention de choisir « les médicaments ou les associations de médicaments associés aux effets secondaires les moins sévères et les moins fréquents ».

En cas d’hyperémèse gravidique, pour estimer son degré de gravité, les experts proposent de réaliser des dosages de la kaliémie, de la natrémie, de la créatininémie et une bandelette urinaire complète, tout en évaluant la perte de poids et la qualité de l’hydratation. En cas d’hyperémèse sans signe de gravité, les traitements sont les mêmes que pour les nausées et vomissements simples. En revanche, une hyperémèse avec signes de gravité implique une hospitalisation pour réhydratation et traitement. « Nous avons tenté de fixer des seuils de perte de poids, explique Philippe Deruelle. Mais en cas d’hospitalisation, il faut rester ouvert et évaluer au cas par cas. » Thomas Schmitz, chef de service à l’hôpital Robert-Debré, à Paris, et coordinateur du groupe de travail, précise : « Lorsque la perte de poids est importante et supérieure à 30 %, la réhydratation seule ne suffit pas. Il s’agit davantage de cas de dénutrition et il faut adapter la prise en charge. » Dans les cas sévères, les experts jugent utile d’administrer systématiquement de la vitamine B1 pour prévenir la survenue chez le fœtus d’une
encéphalopathie de Gayet Wernicke. L’algorithme de prise en charge détaille les traitements administrés en première, deuxième ou troisième intention, associés à des protecteurs gastriques (voir page 28). 

La question du traitement par ondansétron (Zophren®) en cas d’hospitalisation a été débattue. Une étude américaine de 2018 a en effet montré une augmentation minime, mais
significative, du risque de fentes labio-palatines,
de l’ordre de 3 cas supplémentaires pour 10 000 naissances vivantes exposées. Les experts ne recommandent donc son utilisation qu’à partir de douze semaines d’aménorrhée, conformément à l’avis de l’Agence nationale de sécurité du médicament de 2019 et à l’absence d’autorisation de mise sur le marché pour le traitement des nausées et vomissements au premier trimestre de la grossesse. De son côté, le Centre de références sur les agents tératogènes (Crat), dans un avis du 8 juillet 2021, estime que le risque nécessitait d’être confirmé, car « certains facteurs de confusion, tels que les antécédents familiaux, n’ont pas été pris en compte » dans l’étude. Le Crat juge ainsi que l’ondansétron peut être administré après dix semaines d’aménorrhée, soit à la fin de la période d’organogenèse. « Le risque peut être discuté avec la patiente, tout comme l’opportunité d’attendre une à deux semaines de plus avant la prise d’ondansétron », estime Loïc Sentilhes. 

ACCOMPAGNEMENT À DOMICILE

Autre innovation : les experts proposent un accompagnement à domicile après une hospitalisation pour éviter au maximum les récidives et dans les cas où la patiente refuse l’hospitalisation. La surveillance doit être assurée par le médecin traitant, en coordination avec l’hôpital si besoin. Les traitements et la réhydratation par perfusion peuvent ainsi être poursuivis à domicile. L’évaluation de l’état de la patiente est régulière, permettant une réhospitalisation si besoin. « Les femmes sont vraiment satisfaites de ce type d’accompagnement », estime Philippe Deruelle, qui a initié plusieurs prises en charge de ce type et innové en la matière. Les préconisations des experts sont donc bien loin des pratiques inappropriées et
maltraitantes d’isolement. « Nous espérons que la femme qui vomit que l’on oublie au fond du service appartiedra vite au passé, se félicite Audrey Tranchant, de
l’Association de lutte contre l’hyperémèse gravidique. On aimerait aussi ne plus avoir de femmes qui nous appellent en nous disant “on m’a renvoyée sans rien me donner” alors qu’elles ont perdu près de 8 kg ! ». France Artzner, de l’association 9 mois avec ma bassine, s’inquiète cependant de la logistique pour être à même d’hospitaliser les femmes qui en auront besoin : « Les hôpitaux disposent-ils de suffisamment de lits ? » Car les deux militantes en sont sûres : au fur et à mesure que les femmes seront informées, elles se manifesteront davantage auprès des hôpitaux et ne passeront plus sous les radars. Le nombre de cas sévères pourra être correctement évalué. Si l’estimation de 2 % de femmes enceintes souffrant d’hyperémèse grave est juste, cela représente plus de 14 000 cas par an. Il n’est donc plus permis de juger le sujet comme étant anecdotique.

Nour Richard-Guerroudj