Dédié à la recherche et à l’innovation, le centre In’Cube du groupe Danone, inauguré en 2022 à Gif-sur-Yvette, était le lieu parfait pour acceuillir le Grand Prix Evian des sages-femmes en 2023. Les six lauréates sélectionnées ont présenté à l’oral le fruit de leur travail de mémoire de fin d’études devant un jury bienveillant. Habituées à l’exercice, Marjan Nadjafizadeh, directrice de l’école de sages-femmes de Nancy, Anne Chantry, professeure des universités et enseignante à l’école Baudelocque à Paris, Céline Puill, sage-femme libérale au Havre et membre de l’Association nationale des sages-femmes libérales (ANSFL), se sont une nouvelle fois prêtées au jeu de siéger au jury. À leurs côtés, Céline Mahieu, sage-femme enseignante à Rouen et Emma Coutadeur, sage-femme à l’hôpital Foch, en ont aussi fait l’expérience. Les six lauréates du Grand Prix Evian 2023 des sages-femmes. © D.R. Alors que chaque année, un thème lié à l’alimentation du nourrisson est choisi parmi la cinquantaine de travaux adressés au jury, le travail de Marion Raffin, diplômée de l’école de Poitiers, sur l’allaitement maternel et la complémentation en préparation pour nourrissons, a été retenu en 2023. Partant du constat que l’introduction de compléments en préparation pour nourrissons lors d’un allaitement maternel exclusif a doublé en 4 ans au sein de la maternité de Colmar, pourtant labélisée « Initiative Hôpital Ami des bébés », Marion Raffin a réalisé une étude cas-témoin de 290 nouveau-nés en 2020 et 2021. Au total, les dossiers de 145 nouveau-nés complémentés ont été comparés à autant de dossiers de nouveau-nés allaités exclusivement par leur mère. Mais si les dossiers ont permis d’identifier les facteurs liés à une complémentation, il n’ont pas permis d’expliquer l’augmentation de ces complémentations. L’arrivée en 2020 de nouveaux personnels, qui n’ont pu être formés aux protocoles en raison de la crise du Covid-19, explique davantage les changements. En 2021,…
Sur le même thème
« On redécouvre d’anciennes méthodes de contraception masculine »
Quel est l’état des lieux de la contraception masculine en France ? La contraception masculine est sous-développée. Cela s’explique par plusieurs facteurs historiques et sociétaux. On a mis plus d’argent dans le développement de la contraception féminine et il est plus facile de bloquer une ovulation que de bloquer la spermatogenèse. L’enjeu d’une grossesse est aussi plus important pour les femmes. En France, à partir du moment où la contraception a été légalisée, elle s’est médicalisée. Le mouvement a été très rapide. Il a fallu moins d’une décennie pour que la pilule supplante toutes les autres méthodes. Dans les années 1970 et 1980, il y a eu quelques études sur des méthodes innovantes de contraception masculine (hormonale, thermique), mais tout s’est arrêté dans les années 1980 avec l’épidémie de Sida. Le préservatif est devenu incontournable. En outre, le marché des pilules est devenu très rentable. Donc des intérêts économiques ont rejoint des intérêts de santé publique et le sujet a été abandonné. D’un point de vue social, les femmes étaient plutôt contentes d’utiliser des méthodes qui leur étaient propres, l’arsenal mis à leur disposition a augmenté et tout cela a totalement déresponsabilisé les hommes de cet enjeu. Aujourd’hui, dans de très nombreux couples, Monsieur connaît mal la méthode contraceptive utilisée. Ce statu quo est moins bien supporté par les femmes de la jeune génération. Il y a aussi un désamour des hormones. Le coup de projecteur est également porté davantage sur les hommes, que ce soit pour les soins aux enfants, le congé paternité, et le travail reproductif, dont fait partie la contraception. Cela se traduit par un regain d’intérêt pour la vasectomie, qui a beaucoup augmenté. Aujourd’hui, il y a plus de vasectomies que de ligatures des trompes. C’est totalement nouveau. D’après les données de l’Assurance Maladie, en 2021, il...
Le devoir de pharmacovigilance
« Les médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes et pharmaciens déclarent tout effet indésirable suspecté d’être dû à un médicament dont ils ont connaissance », stipule l’article L5121-25 du Code de la santé publique. Le non-respect de cette obligation de déclaration est passible d’une amende. Il s’agit donc d’une faute pénale, d’une contravention. La pharmacovigilance regroupe l’ensemble des techniques d’identification, d’évaluation et de prévention du risque d’effet indésirable des médicaments, afin d’en améliorer le rapport bénéfices/risques. UNE POPULATION FRAGILE La pharmacovigilance a été mise en place dans les années 1960, suite à l’affaire de la Thalidomide (médicament sédatif prescrit aux femmes enceintes dans les années 1950-60 pour soulager les nausées, maux de tête, etc., qui a provoqué de graves malformations des membres, des neuropathies périphériques et des décès chez près de 12 000 enfants dans le monde. Ce médicament n’avait pas été prescrit en France ni aux États-Unis. En ce qui concerne les femmes enceintes, la pharmacovigilance est particulièrement importante puisqu’elles sont écartées systématiquement des essais cliniques en tant que population fragile. Les éléments relatifs aux effets indésirables des médicaments sur les femmes enceintes sont donc uniquement basés sur les déclarations faites par les femmes qui ont pris le médicament malgré leur grossesse. Les données sur les médicaments prescrits aux femmes enceintes doivent être conservées pendant quarante ans, en raison des effets possibles des médicaments sur l’enfant. Par exemple, les effets du Distilbène pris par les mères pendant la grossesse ont été constatés chez les enfants devenus adultes. La pharmacovigilance est pilotée au niveau national par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), assistée par son réseau de 31 centres régionaux de pharmacovigilance (CRPV). Ce système s’intègre dans l’organisation à l’échelle européenne de la pharmacovigilance. Dès lors qu’une sage-femme a connaissance d’un effet indésirable causé par un médicament, elle doit en alerter le...
Deuil périnatal : quelle place pour les sages-femmes ?
L’accompagnement du deuil périnatal est devenu une évidence en maternité. Avec les associations de parents et les psychologues, les sages-femmes peaufinent cette clinique au contact des familles depuis une vingtaine d’années. Dans plusieurs établissements, des initiatives ont émergé pour permettre aux parents endeuillés de se recueillir et créer des rituels (voir p. 21 et 28). Les réflexions sur les soins palliatifs ont aussi donné une place aux sages-femmes. Celle-ci est spécifique. Comme en témoigne Anne Dejean, sage-femme membre de Paliped – l’équipe ressources de soins palliatifs pédiatriques en Île-de-France – les sages-femmes accompagnent les femmes et les familles dans le temps présent (lire p. 31). Les psychologues, eux, ont vocation à les faire cheminer dans le processus de deuil. Des progrès restent à faire. Le Réseau de santé périnatale parisien (RSPP) a par exemple initié un projet ambitieux pour aider les équipes à améliorer les photos mémorielles prises lors du décès d’un tout-petit (lire p. 24). De nombreuses réflexions, issues du contact avec les familles, restent à mener pour améliorer le savoir-être face au deuil ou proposer de nouveaux dispositifs d’accompagnement. ACCOMPAGNER LA FAMILLE AU SENS LARGE Au cours d’une formation organisée par le RSPP et les associations Spama et Petite Émilie le 16 octobre dernier, des partages d’expérience ont porté sur l’accompagnement des familles au sens large. Concernant les couples, des propositions ont émergé des échanges. Par exemple, lors de la décision d’IMG, comme seule la signature de la mère est légalement indispensable, certaines équipes proposent au père de signer symboliquement, de tendre le stylo à sa compagne ou de lui donner la main. L’objectif est que le poids de la décision ne pèse pas sur les seules épaules de la mère et d’éviter que cette signature ne fasse le lit d’une culpabilité encore plus intense. Prévenir le couple en amont des temporalités...