Valérie Dupouey, avec toute la bienveillance possible

Valérie Dupouey partage son temps entre le centre de planning familial de l’hôpital Jean-Verdier à Bondy (93) et le centre d’orthogénie de l’hôpital Avicenne à Bobigny (93). En plus de coordonner et d’encadrer les équipes médicales et paramédicales, elle assure des consultations pré-IVG et de contraception.

Comment avez-vous choisi de devenir sage-femme ? Était-ce par vocation ?

Non, pas réellement. En sortant du bac, j’hésitais sur la voie à prendre. Je savais juste que je travaillerais dans la santé. C’est ma soeur qui m’a guidée ! J’ai fait une garde d’initiation à l’hôpital Foch de Suresnes, où j’ai fait mes études par la suite. Cet aperçu du métier de sage-femme m’a emballée et j’ai continué.
Diplômée en 1989, j’ai exercé dans plusieurs maternités d’Île-de-France. On m’a ensuite proposé un poste à Jean-Verdier, comme sage-femme en salle de naissance. J’y suis restée une quinzaine d’années. En 2008, j’ai pris une disponibilité d’un an pour partir en mission humanitaire avec Médecins sans frontières (MSF), dans le sud de la Chine, au Guangxi, région limitrophe avec le Viêt-Nam.

Le voyage en Chine

L’objectif de la mission était de former les accoucheuses traditionnelles dans les villages, afin qu’elles puissent procéder aux accouchements elles-mêmes et sur place. Elles avaient reçu la formation théorique par une sage-femme australienne. Je venais dans un second temps, pour assurer leur formation pratique. Ces villageoises étaient de minorités Miao et Dong. Quand nous arrivions dans les hôpitaux de la région, le racisme à leur égard était tel que nous n’avons même pas pu aller au bout de la mission. Les autres minorités et la majorité Han s’opposaient farouchement à ce qu’elles deviennent autonomes. Ce fut une grosse déception pour moi, mais aussi une expérience fondatrice. Notamment en ce qui concerne l’interruption volontaire de grossesse (IVG).
L’accès à l’IVG était libre, en Chine, les patientes venaient à l’hôpital sans rendez-vous. J’ai pu observer le travail d’un gynécologue dans la ville voisine. Quelques minutes à peine après l’entretien, l’IVG était réalisée dans une salle attenante, par aspiration utérine, sans plus de cérémonie ni accompagnement d’aucune sorte. Il n’y avait ni analgésie ni soutien psychologique. Cinq ou dix minutes après la consultation, l’affaire était réglée et ces pauvres femmes rentraient chez elles au bout d’une demi-heure. J’ai été profondément touchée par leur solitude et leur détresse. D’autant que c’était, pour la plupart, des IVG sous contrainte. Même lorsqu’elles auraient voulu garder leur enfant, la politique du gouvernement les contraignait à mettre un terme à leur grossesse. À cette époque, c’était un enfant par femme. Dans les campagnes reculées, il était permis d’avoir deux enfants espacés de quatre ans. J’ai vu les larmes de ces femmes, la douleur psychologique intense, l’absence totale d’accompagnement, le déni de leur souffrance. C’était très dur.