Grand Angle

Les Maisons des femmes essaiment

En France, près de 670 000 femmes subissent des violences chaque année, dont 220 000 au sein de leur couple, selon des données de l’Insee pour la période 2012-2018 (1). Près de 125 000 ont subi des mutilations sexuelles féminines, selon une estimation de Santé publique France (SPF) de 2019 (2). Ne serait-ce que concernant les violences au sein du couple, le coût pour la société s’élève à 3,6 milliards d’euros par an, en termes d’aides sociales, de perte de capacité de production et de coût médicaux directs, selon une étude de SPF de 2016 (3). À Saint-Denis, en Seine-Saint-Denis (93), dès juillet 2016, une équipe emmenée par Ghada Hatem, gynécologue-obstétricienne à l’hôpital Delafontaine, prend à bras le corps ce problème de santé publique et construit un modèle de soins global. Les sages-femmes y tiennent une place importante. Très vite, le modèle rayonne au niveau national et au-delà.  UN DÉPLOIEMENT PROGRESSIF  D’autres Maisons des femmes voient le jour, comme à Bruxelles, en Belgique, en novembre 2017. En 2020, La Maison de Soie, adossée au centre hospitalier de Brive-la-Gaillarde, et Casavia, adossée à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris, ouvrent à leur tour. Puis quatre autres structures se créent en 2021 à Bordeaux, Reims, Le Havre et Tours, toutes rattachées au CHU local. Les villes de Marseille, Versailles, Elbeuf-Louviers, Grenoble, Longjumeau, Orléans et Avignon se dotent aussi d’une telle structure. Une maison doit ouvrir à Rennes en octobre prochain. Ce déploiement correspond à un double mouvement. D’une part, des initiatives locales émergent, animées par des professionnels engagés, s’inspirant de la Maison de Saint-Denis. D’autre part, un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas), publié en 2017, reconnait La Maison des femmes de Saint-Denis comme modèle à -soutenir et à dupliquer. L’Igas recommande ainsi la -création d’une mission d’intérêt général (MIG) pour financer le déploiement des structures. […]

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Actus

Dans les Drom, une santé périnatale dégradée

Pour la première fois, l’Enquête nationale périnatale (ENP) s’est doublée d’un volet spécifiquement consacré aux départements d’Outre-mer (Drom). Ce n’est pas du luxe. Les indicateurs de périnatalité y sont en effet globalement plus défavorables. Les autorités sanitaires, les scientifiques et les soignants disposent enfin de données solides pour comprendre et envisager des pistes afin d’améliorer la santé maternelle et néonatale dans ces régions. Comme pour l’ENP 2021, l’étude portant sur les Drom, et menée en parallèle de l’ENP générale, a permis de constituer des cohortes de 800 à 1000 naissance par département. Les femmes ont été interrogées à la maternité, puis 2 mois après leur accouchement. Avoir mené ces études en parallèle et avoir collecté les données de la même manière permet leur comparaison avec celles obtenues en métropole. Si les résultats de l’ENP 2021 sont connus depuis l’automne -dernier (octobre 2022), ceux consacrés aux Drom se sont fait attendre. Santé publique France a diffusé fin juin les données à propos de la Martinique, de la Guadeloupe et de la Réunion. « Les rapports concernant Mayotte et la Guyane seront publiés ultérieurement », annonce l’institution. Des facteurs de risques plus nombreux Globalement, en Guadeloupe, en Martinique et à la Réunion, les femmes sont plus pauvres, plus jeunes, moins éduquées et moins bien couvertes qu’en métropole. La précarité y est plus importante. Sur ces trois îles, la part des ménages déclarant un revenu mensuel inférieur à 1 000 euros net était comprise entre 25 % et plus de 33 %, contre 7,5 % dans l’Hexagone. En Martinique, le taux de femmes sans couverture sociale en début de grossesse est quatre fois plus élevé qu’en France hexagonale (4 % versus 1 %). Le taux de femmes sans couverture maladie complémentaire est quant à lui deux fois supérieur à celui observé en France hexagonale (13,4 % versus 7 %). Autre facteur de risque notable avant la […]

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Actus

Entretien avec Alice Olivier : « Au sein des études de sage-femme, les hommes maintiennent leurs privilèges de genre »Entretien avec Alice Olivier :

Pourquoi vous êtes-vous intéressée aux étudiants hommes, qui font exception dans les écoles de sages-femmes ? Je viens de la sociologie de l’éducation et du genre. Je m’intéressais aux orientations atypiques au niveau du genre. De nombreuses recherches ont montré que les femmes et les hommes font des choix d’orientation différents. D’autres travaux avaient été menés sur l’orientation des femmes vers des professions très masculinisées, mais peu l’inverse. C’est pourquoi j’ai souhaité enquêter sur les hommes au sein de filières très féminisées. La maïeutique représente bien un métier associé aux femmes, d’autant que la profession était fermée aux hommes jusqu’en 1982. L’assistance sociale a aussi une histoire et des caractéristiques associées aux femmes. Mon hypothèse était que ces formations seraient une bonne loupe pour mettre à jour des dynamiques de genre. C’est seulement par la suite que je me suis rendu compte que les médias s’intéressaient souvent aux hommes sages-femmes et que cet intérêt interrogeait les sages-femmes. Qu’avez-vous observé lors de votre enquête ? Un résultat important est mis en avant dans le titre du livre : dans les formations très féminisées, les hommes se distinguent des femmes. Cette idée de distinction renvoie d’abord à leur rareté, qui les rend visibles. Se distinguer implique aussi de se différencier et d’être valorisé. J’ai constaté que les étudiants tirent des bénéfices de leur genre au sein de la formation. Par exemple, au sein des promotions, ils adoptent souvent le rôle de porte-parole. Ils sont surreprésentés dans les associations étudiantes, ou lorsqu’il s’agit de négocier des choses avec les enseignantes. Cela fait écho à ce que l’on retrouve plus tard sur le marché du travail, où les hommes sont plus nombreux dans les rôles de représentation. Ils prennent des rôles visibles.  Autre exemple : plusieurs étudiants ont eu une proposition d’emploi avant la fin de leur formation. C’est […]

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Actus

La Sage-femme du roi

« Comme il faut qu’il sorte vite, le ptiot, moi je fais sauter la mère tant qu’elle peut. Ça décroche son fruit. » Au XVIIIe siècle, les matrones ont des techniques bien à elles pour accompagner les naissances. Ces femmes n’ont eu comme formation que leurs propres accouchements. La mortalité maternelle et infantile est très élevée dans les campagnes françaises. Sans compter les nombreux enfants malformés. En ville, spécialement à Paris, la situation est un peu différente. Des sages-femmes formées exercent, mais elles sont peu nombreuses et se heurtent aux chirurgiens pour qui les naissances représentent un marché juteux : ils se font rémunérer trois fois plus que les sages-femmes. D’ailleurs, la bande dessinée s’ouvre sur un exploit de ces nouveaux obstétriciens. En 1747, dans l’amphithéâtre de l’Académie royale de chirurgie, plusieurs dizaines de chirurgiens aux perruques poudrées assistent à la démonstration d’un nouvel outil : le forceps. Pour les besoins de l’exposé, une parturiente accouche en public. Placée en position gynécologique, elle est sanglée sur une table. Le décor est planté. Plus tard, Angélique du Coudray, une sage-femme reconnue qui forme des apprenties, rencontre au cours d’une soirée le philosophe et scientifique Denis Diderot. En pleine écriture de son encyclopédie, il refuse la contribution de la sage-femme. Pour lui, les femmes ne savent pas écrire. Surtout, les sages-femmes représentent le passé, quand les nouveaux accoucheurs sont l’avenir et la science. Lassée par ce climat, Angélique du Coudray finit par accepter la proposition du baron de Thiers. Sensibilisé par son épouse au drame de la mortalité maternelle et néonatale qui décime sa province reculée, où n’exercent que des matrones, ce dernier la presse de l’y rejoindre. En octobre 1751, au terme d’une semaine de voyage, Madame du Coudray arrive au cœur de l’Auvergne. Elle s’y heurte à la méfiance et à la superstition, ainsi […]

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Point juridique

LES DROITS ET DEVOIRS DE LA COLLABORATRICE LIBÉRALE

Le contrat de collaboration n’est pas un simple contrat de travail. Ce type de contrat a été initialement prévu afin de permettre à une nouvelle sage-femme de s’installer et de se constituer une patientèle. Tout en travaillant pour une sage-femme déjà installée, la collaborattrice s’occupe des patientes de cette dernière et bénéficie de ses locaux, de son matériel et de son expérience. La collaboration permet à la sage-femme installée d’organiser progressivement sa cessation d’activité ou sa future association.  La sage-femme installée qui emploie la collaboratrice doit lui laisser suffisamment de temps pour se constituer sa patientèle propre. Même si elle doit se consacrer aux patientes de la sage-femme installée, du temps doit être prévu – idéalement par écrit dans le contrat de collaboration – pour que la collaboratrice puisse se constituer sa propre patientèle. La collaboratrice libérale n’est pas salariée et ne bénéficie donc pas d’un certain nombre d’avantages des salariés (droit du licenciement, droits sociaux comme la mutuelle…). La contrepartie de ce statut particulier est de pouvoir développer sa patientèle propre et d’acquérir une expérience solide dans la pratique libérale grâce aux -informations et au soutien de la sage-femme installée. Cette dernière doit partager, en plus des éléments matériels du cabinet, son expérience avec sa collaboratrice (pratique professionnelle, gestion du cabinet).  La collaboratrice conserve cependant son indépendance d’exercice et aucun lien de subordination n’existe entre les deux sages-femmes. L’exercice en collaboration libérale est donc un exercice d’équilibriste pour lequel il faut parvenir à harmoniser les rapports de travail. Afin de faciliter cette harmonisation, il est conseillé de prévoir un maximum d’éléments dans le contrat de collaboration au moment de la signature et de prendre le temps, au moins une fois par an, de faire le point sur le contrat, la patientèle, les horaires, la redevance, etc., afin que ces […]

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Pratiques

Au Liban, des sages-femmes en VAD pour prévenir la morbidité maternelle

« Je suis très, très contente d’entendre le cœur de mon bébé », sourit Hélène Mohsen. Cette mère de trois enfants était anxieuse, ne sentant plus le fœtus bouger à deux jours de son terme. Elle n’a pas eu à se déplacer : Amal Al Nemer, sage-femme, est venue à son domicile. Le doppler confirme que tout va bien. La sage-femme surveille également sa tension, puis lui montre quelques positions qui facilitent l’accouchement.  La sage-femme, qui travaille dans la région reculée et défavorisée du Hermel, s’enquiert également des habitudes alimentaires d’Hélène. « Combien de tasses de café bois-tu chaque jour ? Est-ce que tu manges bien ? » À la fin de la consultation, Helène Mohsen confie que les visites de cette sage-femme lui permettent de se sentir « plus sereine ». « Elle me donne des conseils et m’a aussi soutenue psychologiquement à l’annonce de la grossesse, qui a été difficile. Je me suis dit “mais comment va-t-on faire ?’’ » UN CONTEXTE DE CRISE Hélène enseigne l’arabe dans une école publique libanaise. Son mari est également enseignant. Avec leurs trois enfants, ils ont à peine de quoi se loger et louent une maison humide restée en chantier. La famille représente cette classe moyenne libanaise qui a basculé dans la pauvreté depuis la crise économique de 2019, qui a entraîné un effondrement de la monnaie locale et du pouvoir d’achat de la population. Pour la Banque mondiale, il s’agit de « l’un des dix, voire des trois effondrements -économiques les plus graves que le monde ait connu depuis les années 1850, au point de menacer la stabilité et la paix sociale à long terme du Liban ». « Il y a désormais peu de joie autour des grossesses », témoigne Amal Al Nemer, avec le recul de ses treize ans d’expérience. « Les femmes se demandent comment elles vont nourrir leur enfant et financer leur éducation. […]

Grand Angle

MIEUX ACCOMPAGNER LES PERTES PRÉCOCES DE GROSSESSE

Auparavant taboues, les fausses couches sont en train de devenir un sujet social et politique, grâce aux voix des femmes. Une sur dix est concernée, dans le cadre d’une grossesse sur quatre. C’est donc un véritable enjeu de santé publique. En 2007, le recueil de témoignages Quel âge aurait-il aujourd’hui ?, de Stéphane Clerget (Fayard), espérait donner une reconnaissance sociale aux femmes qui avaient vécu une perte précoce de grossesse. Mais la société n’était pas prête. Il a fallu le sillage de MeToo pour que les prises de parole se multiplient, jusqu’à entamer une prise de conscience politique.  PRISE DE CONSCIENCE RÉCENTE Depuis 2017, des personnalités publiques osent confier leur vécu, comme Michelle Obama, Meghan Markle, Beyoncé ou encore Marlène Schiappa ou Adriana Karembeu. En mai 2021, Judith Aquien publie Trois mois sous silence (Payot et Rivages). Puis c’est au tour de Mathilde Lemiesle de publier la BD Mes presque riens, aux éditions Lapin, en septembre de la même année, après un blog et un compte instagram éponymes. La dessinatrice poursuit son action en illustrant le récit de Sandra Lorenzo, Une fausse couche comme les autres, publié en février 2022 chez First.  Banalisation de l’événement, manque d’empathie des soignants et absence de reconnaissance de la souffrance liée à la perte : les femmes dénoncent un déni de leur souffrance. Sans compter le défaut d’information sur la réalité d’une grossesse arrêtée. En février 2022, Mathilde Lemiesle a aussi illustré le dossier de presse de la première proposition de loi sur le sujet, portée par l’ex-députée écologiste indépendante Paula Forteza. Avec huit articles, ce texte ambitieux prévoyait la création d’un parcours de soins intégrant un suivi psychologique, la mise en place d’une plateforme d’écoute, d’orientation et d’information, le « droit au télétravail » pour les femmes enceintes, une campagne publique d’information, l’intégration des sujets liés à […]

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Actus

QUAND LES SAGES-FEMMES FONT LEUR PPL

Il est d’usage que des professionnels soumettent des propositions aux élus de la nation, soit directement sous forme d’amendements pré-rédigés, soit lors d’auditions parlementaires. Il est moins classique qu’un groupe professionnel rédige une proposition de loi entière. Dénonçant l’état préoccupant de la périnatalité, de la santé des femmes et de la situation des sages-femmes, les syndicats et associations de sages-femmes ont pris le parti de le faire. Le texte a été rendu public le 5 mai dernier, à l’occasion de la Journée internationale des sages-femmes. Une campagne visuelle a aussi été déclinée sur les réseaux sociaux pour faire connaître l’initiative. DES PROPOSITIONS AMBITIEUSES L’Anesf, l’ANSFC, l’ANSFL, l’ANSFT, la CNEMa, le CNSF, l’ONSSF, l’UNSSF et l’Ordre des sages-femmes se sont mis d’accord sur pas moins de 22 articles. Seules la Société française de maïeutique, peu active et peu visible, et l’Association pour l’accompagnement de l’accouchement à domicile (Apaad) n’ont pas signé le texte. Alors que les divisions entre organisations ont desservi la profession jusqu’ici, la publication de cette proposition de loi (PPL) est une affirmation publique d’union. Dans la lignée du Livre blanc des sages-femmes, le texte propose d’abord de demander un rapport sur la santé sexuelle et reproductive des femmes, préalable à la tenue d’États généraux sur ce thème. Pour améliorer la santé des femmes, elle demande que chaque projet régional de santé comporte un volet dédié à la santé génésique des femmes. Elle plaide notamment pour la mise en place de trois rendez-vous de santé sexuelle aux différents âges de la vie, la création de consultations de gynécologie adaptées pour les personnes en situation de handicap, l’élargissement de la durée de l’assurance maternité à 100 % pour y intégrer les entretiens prénataux et postnataux, le remboursement à 100 % des consultations post interruption -spontanée ou volontaire de grossesse réalisées par une sage-femme. Elle […]

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Actus

« Le féminisme doit être une réjouissance », entretien avec Caroline Sahuquet

Quel est votre parcours au théâtre ? J’ai commencé le théâtre à 7 ans, à l’école. Mon professeur de théâtre, Alain Lagneau, était malade. Il souffrait d’alcoolisme. Il est parti en cure de désintoxication lorsque j’avais 12 ans. Je l’ai retrouvé à 17 ans, alors qu’il avait fondé l’association Acthéâtre, où le théâtre était mis au service des malades d’addiction. De là est née mon approche du théâtre comme outil thérapeutique et de résilience. À 20 ans, je jouais sa pièce AL, qu’il a écrite pour aborder l’alcoolisme. Ce théâtre de terrain accompagne les malades, les soignants et la société, qui est poussée à réfléchir. En parallèle, j’ai passé ma licence d’études de théâtre en 2000 et le diplôme d’État de professeur de théâtre en 2010. Ayant commencé à travailler tôt dans des théâtres privés, sans être passée par le conservatoire, je n’avais pas toutes les informations pour percer dans le milieu. Certaines portes me restaient fermées à 22 ans. En 2002, avec Alice Luce, scénariste, nous avons décidé de créer notre structure,Mi-fugue, ­Mi­-raison, pour travailler avec des artistes isolés, les aider à présenter leur travail et à se produire devant différents publics. Il s’agissait aussi de donner une place aux femmes artistes, souvent mal rémunérées dans le milieu. En parallèle, je donnais des cours de théâtre à des malades alcooliques, pour les aider à restaurer leur propre estime et les sortir de leur isolement. En 2005, la compagnie a adopté une vision politique de lutte contre les violences faites aux personnes discriminées. Avec Stéphanie Colonna et Jacques Plaideau, nous avons formalisé une méthode innovante de développement personnel grâce à l’outil théâtral, au service de publics prioritaires. Nous avons proposé des stages de restauration de l’estime de soi. Cette action répondait d’abord à un appel d’offre du Fond social Européen, puis elle s’est pérennisée. Elle est […]

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Pratiques

Examens gynécologiques : le CCNE rend son avis

« Cet avis pousse à la sérénité mais pas à l’immobilisme ». Tel est l’esprit de l’avis n° 142 du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) sur le consentement lors des examens intimes, publié le 29 mars, selon Jean-François Delfraissy, qui préside l’instance. Cet avis répond à la saisine de la Première ministre suite aux plaintes déposées par des patientes pour viol gynécologique. Au bout de huit mois de travaux et d’auditions, « le comité a fait le choix d’aborder l’ensemble des examens qui touchent à la pudeur, à l’intimité et à l’intégrité de façon particulière », précise Karine Lefeuvre, juriste et vice-présidente du CCNE. Si l’avis concerne surtout les femmes, qui connaissent en moyenne entre 50 à 80 consultations gynécologiques au cours de leur vie, il s’adresse aussi aux hommes « dont l’absence de plaintes ne signifie pas l’absence de maux ». Les professionnels concernés ne se limitent donc pas aux -gynécologues-obstétriciens et sages-femmes. Urologues, proctologues, gastro–entérologues, radiologues, urgentistes, dermatologues, généralistes, kinésithérapeutes, ostéopathes, infirmiers et -aides-soignants de tous les secteurs sont aussi inclus. LE CADRE DU CONSENTEMENT « Comment la violence peut-elle surgir alors que le geste soignant consiste précisément en une attention au corps de l’autre ? », s’est interrogé le comité. De façon salutaire, il rappelle d’abord des évidences : « Le corps n’est jamais dissociable d’un psychisme.(…) C’est cette prise en compte de leur subjectivité qui, pour les patient(e)s, rend la nudité et l’examen acceptables ». À l’inverse, la négation de la pudeur et de « l’extrême intimité » est « objectivante et destructrice ».Et de rappeler avec justesse les travers du système de soins : « Les institutions soignantes sont soumises à des rythmes et des contextes de travail qui peuvent conduire les soignant(e)s à neutraliser leurs émotions, au risque de la dépersonnalisation ».  Le CCNE précise ensuite les contours du consentement, une notion connue des soignants depuis la loi Kouchner de 2004, mais dont les implications concrètes […]