« Comme il faut qu’il sorte vite, le ptiot, moi je fais sauter la mère tant qu’elle peut. Ça décroche son fruit. » Au XVIIIe siècle, les matrones ont des techniques bien à elles pour accompagner les naissances. Ces femmes n’ont eu comme formation que leurs propres accouchements. La mortalité maternelle et infantile est très élevée dans les campagnes françaises. Sans compter les nombreux enfants malformés. En ville, spécialement à Paris, la situation est un peu différente. Des sages-femmes formées exercent, mais elles sont peu nombreuses et se heurtent aux chirurgiens pour qui les naissances représentent un marché juteux : ils se font rémunérer trois fois plus que les sages-femmes. D’ailleurs, la bande dessinée s’ouvre sur un exploit de ces nouveaux obstétriciens. En 1747, dans l’amphithéâtre de l’Académie royale de chirurgie, plusieurs dizaines de chirurgiens aux perruques poudrées assistent à la démonstration d’un nouvel outil : le forceps. Pour les besoins de l’exposé, une parturiente accouche en public. Placée en position gynécologique, elle est sanglée sur une table. Le décor est planté. © D.R. Plus tard, Angélique du Coudray, une sage-femme reconnue qui forme des apprenties, rencontre au cours d’une soirée le philosophe et scientifique Denis Diderot. En pleine écriture de son encyclopédie, il refuse la contribution de la sage-femme. Pour lui, les femmes ne savent pas écrire. Surtout, les sages-femmes représentent le passé, quand les nouveaux accoucheurs sont l’avenir et la science. Lassée par ce climat, Angélique du Coudray finit par accepter la proposition du baron de Thiers. Sensibilisé par son épouse au drame de la mortalité maternelle et néonatale qui décime sa province reculée, où n’exercent que des matrones, ce dernier la presse de l’y rejoindre. En octobre 1751, au terme d’une semaine de voyage, Madame du Coudray arrive au cœur de l’Auvergne. Elle s’y heurte à la méfiance et à la…
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MIEUX ACCOMPAGNER LES PERTES PRÉCOCES DE GROSSESSE
TweetAuparavant taboues, les fausses couches sont en train de devenir un sujet social et politique, grâce aux voix des femmes. Une sur dix est concernée, dans le cadre d’une grossesse sur quatre. C’est donc un véritable enjeu de santé publique. En 2007, le recueil de témoignages Quel âge aurait-il aujourd’hui ?, de Stéphane Clerget (Fayard), espérait donner une reconnaissance sociale aux femmes qui avaient vécu une perte précoce de grossesse. Mais la société n’était pas prête. Il a fallu le sillage de MeToo pour que les prises de parole se multiplient, jusqu’à entamer une prise de conscience politique. PRISE DE CONSCIENCE RÉCENTE Depuis 2017, des personnalités publiques osent confier leur vécu, comme Michelle Obama, Meghan Markle, Beyoncé ou encore Marlène Schiappa ou Adriana Karembeu. En mai 2021, Judith Aquien publie Trois mois sous silence (Payot et Rivages). Puis c’est au tour de Mathilde Lemiesle de publier la BD Mes presque riens, aux éditions Lapin, en septembre de la même année, après un blog et un compte instagram éponymes. La dessinatrice poursuit son action en illustrant le récit de Sandra Lorenzo, Une fausse couche comme les autres, publié en février 2022 chez First. Banalisation de l’événement, manque d’empathie des soignants et absence de reconnaissance de la souffrance liée à la perte : les femmes dénoncent un déni de leur souffrance. Sans compter le défaut d’information sur la réalité d’une grossesse arrêtée. En février 2022, Mathilde Lemiesle a aussi illustré le dossier de presse de la première proposition de loi sur le sujet, portée par l’ex-députée écologiste indépendante Paula Forteza. Avec huit articles, ce texte ambitieux prévoyait la création d’un parcours de soins intégrant un suivi psychologique, la mise en place d’une plateforme d’écoute, d’orientation et d’information, le « droit au télétravail » pour les femmes enceintes, une campagne publique d’information, l’intégration des sujets liés à...

« Le féminisme doit être une réjouissance », entretien avec Caroline Sahuquet
TweetQuel est votre parcours au théâtre ? J’ai commencé le théâtre à 7 ans, à l’école. Mon professeur de théâtre, Alain Lagneau, était malade. Il souffrait d’alcoolisme. Il est parti en cure de désintoxication lorsque j’avais 12 ans. Je l’ai retrouvé à 17 ans, alors qu’il avait fondé l’association Acthéâtre, où le théâtre était mis au service des malades d’addiction. De là est née mon approche du théâtre comme outil thérapeutique et de résilience. À 20 ans, je jouais sa pièce AL, qu’il a écrite pour aborder l’alcoolisme. Ce théâtre de terrain accompagne les malades, les soignants et la société, qui est poussée à réfléchir. En parallèle, j’ai passé ma licence d’études de théâtre en 2000 et le diplôme d’État de professeur de théâtre en 2010. Ayant commencé à travailler tôt dans des théâtres privés, sans être passée par le conservatoire, je n’avais pas toutes les informations pour percer dans le milieu. Certaines portes me restaient fermées à 22 ans. En 2002, avec Alice Luce, scénariste, nous avons décidé de créer notre structure,Mi-fugue, Mi-raison, pour travailler avec des artistes isolés, les aider à présenter leur travail et à se produire devant différents publics. Il s’agissait aussi de donner une place aux femmes artistes, souvent mal rémunérées dans le milieu. En parallèle, je donnais des cours de théâtre à des malades alcooliques, pour les aider à restaurer leur propre estime et les sortir de leur isolement. En 2005, la compagnie a adopté une vision politique de lutte contre les violences faites aux personnes discriminées. Avec Stéphanie Colonna et Jacques Plaideau, nous avons formalisé une méthode innovante de développement personnel grâce à l’outil théâtral, au service de publics prioritaires. Nous avons proposé des stages de restauration de l’estime de soi. Cette action répondait d’abord à un appel d’offre du Fond social Européen, puis elle s’est pérennisée. Elle est...



LES DROITS ET DEVOIRS DE LA COLLABORATRICE LIBÉRALE
TweetLe contrat de collaboration n’est pas un simple contrat de travail. Ce type de contrat a été initialement prévu afin de permettre à une nouvelle sage-femme de s’installer et de se constituer une patientèle. Tout en travaillant pour une sage-femme déjà installée, la collaborattrice s’occupe des patientes de cette dernière et bénéficie de ses locaux, de son matériel et de son expérience. La collaboration permet à la sage-femme installée d’organiser progressivement sa cessation d’activité ou sa future association. La sage-femme installée qui emploie la collaboratrice doit lui laisser suffisamment de temps pour se constituer sa patientèle propre. Même si elle doit se consacrer aux patientes de la sage-femme installée, du temps doit être prévu – idéalement par écrit dans le contrat de collaboration – pour que la collaboratrice puisse se constituer sa propre patientèle. La collaboratrice libérale n’est pas salariée et ne bénéficie donc pas d’un certain nombre d’avantages des salariés (droit du licenciement, droits sociaux comme la mutuelle…). La contrepartie de ce statut particulier est de pouvoir développer sa patientèle propre et d’acquérir une expérience solide dans la pratique libérale grâce aux -informations et au soutien de la sage-femme installée. Cette dernière doit partager, en plus des éléments matériels du cabinet, son expérience avec sa collaboratrice (pratique professionnelle, gestion du cabinet). La collaboratrice conserve cependant son indépendance d’exercice et aucun lien de subordination n’existe entre les deux sages-femmes. L’exercice en collaboration libérale est donc un exercice d’équilibriste pour lequel il faut parvenir à harmoniser les rapports de travail. Afin de faciliter cette harmonisation, il est conseillé de prévoir un maximum d’éléments dans le contrat de collaboration au moment de la signature et de prendre le temps, au moins une fois par an, de faire le point sur le contrat, la patientèle, les horaires, la redevance, etc., afin que ces...