« Quand notre fils Antoine est décédé, le 1er octobre 2005, à six mois et demi de grossesse, la sœur Yacoba m’a offert un galet avec son prénom dessus. Ce galet représente le lien avec la journée d’aujourd’hui. » Ainsi témoigne Corinne, venue en ce 14 septembre 2023 en famille à la journée du souvenir organisée à la maternité des Diaconesses, à Paris, où elle a vécu une mort fœtale in utero 18 ans auparavant. La maternité des Diaconesses, dans le XIIe arrondissement de Paris, et l’association Petite Émilie ont une longue tradition commune en matière d’accompagnement du deuil périnatal. © Nour Richard-Guerroudj À la veille de la Journée mondiale de sensibilisation au deuil périnatal, la maternité des Diaconesses et l’association Petite Émilie ont prévu plusieurs temps pour les familles en ce samedi d’automne. « Sur 50 familles contactées, 5 sont venues, témoigne Laurence Pavie, sage-femme et vice-présidente de Petite Émilie. Pour certains, c’est trop tôt ou trop dur. » Au total, une vingtaine de personnes se retrouvent rassemblées, assises en cercle, dans une salle située dans le jardin de la maternité. Laurence Pavie, avec Hélène Ostermann et Kim Denis, sages-femmes coordinatrices, les accueille. À leurs côtés, deux sœurs de la congrégation des Diaconesses de Reuilly et le pasteur Andreas Lof, aumônier de l’hôpital, se tiennent aussi présents. « Le jardin nous a inspirés pour proposer une cérémonie de deuil pour tous », témoigne Andreas Lof, qui a participé à des groupes de parole autour du deuil périnatal. En réalité, plusieurs rituels, aux références religieuses ténues, voire absentes, se succèderont, laissant les familles libres d’y projeter leurs émotions et représentations. DES RITUELS INCLUSIFS Le déroulé de la journée est détaillé et les familles sont invitées à faire inscrire le prénom de leur enfant décédé sur un galet coloré, qui doit à terme être intégré dans une sculpture autour d’un arbre…
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Deuil périnatal : quelle place pour les sages-femmes ?
TweetL’accompagnement du deuil périnatal est devenu une évidence en maternité. Avec les associations de parents et les psychologues, les sages-femmes peaufinent cette clinique au contact des familles depuis une vingtaine d’années. Dans plusieurs établissements, des initiatives ont émergé pour permettre aux parents endeuillés de se recueillir et créer des rituels (voir p. 21 et 28). Les réflexions sur les soins palliatifs ont aussi donné une place aux sages-femmes. Celle-ci est spécifique. Comme en témoigne Anne Dejean, sage-femme membre de Paliped – l’équipe ressources de soins palliatifs pédiatriques en Île-de-France – les sages-femmes accompagnent les femmes et les familles dans le temps présent (lire p. 31). Les psychologues, eux, ont vocation à les faire cheminer dans le processus de deuil. Des progrès restent à faire. Le Réseau de santé périnatale parisien (RSPP) a par exemple initié un projet ambitieux pour aider les équipes à améliorer les photos mémorielles prises lors du décès d’un tout-petit (lire p. 24). De nombreuses réflexions, issues du contact avec les familles, restent à mener pour améliorer le savoir-être face au deuil ou proposer de nouveaux dispositifs d’accompagnement. ACCOMPAGNER LA FAMILLE AU SENS LARGE Au cours d’une formation organisée par le RSPP et les associations Spama et Petite Émilie le 16 octobre dernier, des partages d’expérience ont porté sur l’accompagnement des familles au sens large. Concernant les couples, des propositions ont émergé des échanges. Par exemple, lors de la décision d’IMG, comme seule la signature de la mère est légalement indispensable, certaines équipes proposent au père de signer symboliquement, de tendre le stylo à sa compagne ou de lui donner la main. L’objectif est que le poids de la décision ne pèse pas sur les seules épaules de la mère et d’éviter que cette signature ne fasse le lit d’une culpabilité encore plus intense. Prévenir le couple en amont des temporalités...
Quel type de suivi pour les femmes à bas risque ?
TweetPourquoi s’intéresser aux femmes à bas risque obstétrical ? On s’intéresse beaucoup aux femmes et aux enfants qui ne vont pas bien, qui vont présenter des complications. En 2014, une série présentée dans le Lancet a montré qu’il y a très peu de recherches sur les femmes à bas risque. Elles représentent pourtant plus de 70 % des femmes enceintes en France et dans le monde. S’intéresser à ces femmes permettra de les prendre en charge le mieux possible, avec les dernières données de la science disponibles. Nous avons lancé toute une série de recherches. Je travaille avec des étudiants, ainsi qu’en collaboration avec d’autres chercheurs. Nous voulons explorer ce qu’il se passe sur le bas risque en France : définition, spécificités par rapport à l’international, particularités du suivi, etc. Comment définissez-vous le bas risque obstétrical ? Cette définition est un enjeu de recherche. Nous menons ce travail avec Isabelle Monnier, également chercheuse à l’Inserm. Il n’existe pas de définition consensuelle dans le monde sur le bas risque. Selon les pays, les définitions ne retiennent pas les mêmes critères. Par exemple, la définition française est issue des recommandations de la HAS, révisées en 2016, qui se basent sur une petite centaine de critères. Cette définition sert à identifier les femmes pour les orienter vers le professionnel le plus adapté pour leur prise en charge anténatale. Donc cette définition est posée au début de la grossesse, même si elle peut évoluer au cours de la grossesse, si des complications se présentent. Les femmes à bas risque peuvent voir le professionnel de leur choix : une sage-femme, un médecin généraliste ou un obstétricien. En Angleterre, le bas risque est défini très différemment. Les recommandations ne servent pas à orienter les femmes vers le bon professionnel selon leur niveau de risque pour le suivi de grossesse, mais vers...
« Les sages-femmes accompagnent le deuil dans l’instant présent »
TweetQu’est-ce que Paliped ? Paliped est né en 2010. Dans le cadre du Programme national de développement des soins palliatifs 2008-2012, chaque région devait se doter d’une équipe ressource en soins palliatifs pédiatriques. Deux pédiatres, deux infirmières puéricultrices, deux psychologues et deux chargées de mission et moi-même composant l’équipe. L’équipe intervient surtout en deuxième ligne, pour accompagner et soutenir les professionnels des établissements hospitaliers, médicosociaux et pédagogiques, impliqués dans l’accompagnement d’enfants en soins palliatifs. Ces soins peuvent durer quelques jours, quelques mois ou quelques années. Paliped intervient le plus souvent sur site, mais les modalités d’intervention sont adaptées selon les besoins. Paliped anime des temps de réflexion ou d’échange, sur des situations ou des thèmes particuliers. L’équipe assure aussi des formations, à la demande des équipes. Nous proposons aussi des réunions post-décès aux équipes. L’équipe de Paliped intervient auprès des familles en complément des équipes référentes, selon les besoins, pour apporter un soutien psychologique et les accompagner dans leur réflexion. Elle soutient les familles pendant le deuil. Les psychologues recherchent des orientations adaptées, facilitent les démarches et les premiers contacts souvent délicats. Ils peuvent également, en fonction des besoins, proposer des entretiens familiaux à domicile. Paliped s’est d’abord développé en pédiatrie avec ses approches. Notre rôle d’équipe ressource en périnatalité n’est pas encore bien identifié par les maternités. Et ces dernières n’ont pas encore bien précisé leurs besoins. Ils peuvent être variables. Là encore, il pourra s’agir de formation ou d’échange sur des cas cliniques ou d’accompagner les équipes sur la durée. Mon rôle est aussi d’acculturer les soignants aux soins palliatifs. Qu’est-ce qui vous a amenée à rejoindre l’équipe ? J’ai travaillé pendant douze ans au sein des services de diagnostic prénatal des hôpitaux de Necker et de Poissy. J’ai souvent été confrontée à des familles souhaitant poursuivre une grossesse pour...