Camille Marolle, sage-femme Entre enfance et âge adulte, l’adolescence est cette période de la vie marquée par de grands changements physiques, psychologiques et sociaux, comprise entre 10 et 19 ans selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) [1]. On ne peut nier qu’il s’agisse d’une étape de la vie qui peut être source d’anxiété pour les parents d’adolescents. Cette anxiété peut se muer en angoisse lorsqu’une vulnérabilité sous-jacente est présente. Selon le Code pénal (article 434-3), la personne vulnérable est « un mineur de 15 ans ou une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge, d’une maladie, d’une infirmité, d’une déficience physique ou psychique ou d’un état de grossesse ». Les personnes en situation de handicap (moteur, sensoriel – déficiences auditive et visuelle -, mental, psychique et maladies invalidantes, troubles envahissants du développement et troubles DYS) ont longtemps été mises de côté dans l’Histoire. Cependant, ces vingt dernières années ont montré un intérêt croissant pour les douze millions de personnes concernées en France, selon l’Insee (2016). L’accès aux soins est ainsi un sujet d’actualité. En effet, l’adulte en situation de handicap apparaît comme moins bien soigné que la population ordinaire. Un retard de prise en charge est également à souligner, avec des dépistages moins fréquents. En 2006, 90 % des femmes en situation de handicap ne bénéficiaient d’aucun suivi gynécologique selon Santé publique France. Sujet déjà tabou dans notre société occidentale, la sexualité des personnes en situation de handicap est cachée, non dite, « mal vue ». On peut même parler d’interdit, lorsque l’on aborde la sexualité et le handicap mental. Longtemps ces personnes renvoyaient l’image « d’éternels enfants […] asexués et dépourvus de libido » selon Michel Desjardins [19]. Il fallait les protéger des « dangers de la sexualité ». Pour ce faire, l’enfermement asilaire ou la stérilisation eugénique étaient utilisés. Alors que ces pratiques…
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« Inciter financièrement les femmes défavorisées à recourir aux soins est une forme de redistribution », Marc Bardou
TweetD’où est venu votre intérêt pour les enjeux d’équité en santé ? Lors de mes recherches en pharmacologie, mon épouse, elle-même gynécologue-obstétricienne, m’a incité à m’intéresser au muscle lisse utérin. Cela m’a permis d’élargir mes recherches à la menace d’accouchement prématuré et à la prééclampsie. Je suis donc arrivé vers l’obstétrique à travers la pharmacologie. Par ailleurs, en tant qu’hépatologue généraliste, je rencontre surtout des personnes obèses, ayant un trouble de la consommation de l’alcool ou des migrants avec des hépatites virales. Ces patients sont en majorité des personnes défavorisées. C’est pourquoi j’ai cherché à mieux comprendre la façon dont ces populations interagissent avec le système de santé. Enfin, j’ai entendu à la radio l’économiste Esther Duflo, qui a reçu le Nobel d’économie en 2019 pour ses travaux sur la pauvreté et les questions de développement. Elle présentait ses études sur les incitations financières à visées sociales, dans le domaine de la scolarisation ou de la vaccination, par exemple. L’incitation économique s’inscrit dans la lignée du « nudge » en économie comportementale. Le « nudge » est un outil de suggestion disposé dans l’environnement, destiné à nous aider à faire le bon choix, pour notre propre intérêt ou celui de la société. C’est un coup de pouce pour inciter quelqu’un à réaliser l’action que l’on désire. Un des nudges les plus connus est la fausse mouche apposée au centre des urinoirs à l’aéroport d’Amsterdam pour inciter les hommes à la viser, réduisant ainsi les salissures. J’ai contacté Esther Duflo et nous avons échangé. C’est ainsi qu’est né le projet Naître. Quel est le dispositif de l’étude Naître ? L’idée est partie du renoncement aux soins, très élevé au sein des ménages dont le revenu est le plus faible. En périnatalité, nous savons qu’un statut socio-économique faible est lié à un risque de soins prénatals inadéquats,...
Examens gynécologiques : le CCNE rend son avis
Tweet« Cet avis pousse à la sérénité mais pas à l’immobilisme ». Tel est l’esprit de l’avis n° 142 du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) sur le consentement lors des examens intimes, publié le 29 mars, selon Jean-François Delfraissy, qui préside l’instance. Cet avis répond à la saisine de la Première ministre suite aux plaintes déposées par des patientes pour viol gynécologique. Au bout de huit mois de travaux et d’auditions, « le comité a fait le choix d’aborder l’ensemble des examens qui touchent à la pudeur, à l’intimité et à l’intégrité de façon particulière », précise Karine Lefeuvre, juriste et vice-présidente du CCNE. Si l’avis concerne surtout les femmes, qui connaissent en moyenne entre 50 à 80 consultations gynécologiques au cours de leur vie, il s’adresse aussi aux hommes « dont l’absence de plaintes ne signifie pas l’absence de maux ». Les professionnels concernés ne se limitent donc pas aux -gynécologues-obstétriciens et sages-femmes. Urologues, proctologues, gastro–entérologues, radiologues, urgentistes, dermatologues, généralistes, kinésithérapeutes, ostéopathes, infirmiers et -aides-soignants de tous les secteurs sont aussi inclus. LE CADRE DU CONSENTEMENT « Comment la violence peut-elle surgir alors que le geste soignant consiste précisément en une attention au corps de l’autre ? », s’est interrogé le comité. De façon salutaire, il rappelle d’abord des évidences : « Le corps n’est jamais dissociable d’un psychisme.(…) C’est cette prise en compte de leur subjectivité qui, pour les patient(e)s, rend la nudité et l’examen acceptables ». À l’inverse, la négation de la pudeur et de « l’extrême intimité » est « objectivante et destructrice ».Et de rappeler avec justesse les travers du système de soins : « Les institutions soignantes sont soumises à des rythmes et des contextes de travail qui peuvent conduire les soignant(e)s à neutraliser leurs émotions, au risque de la dépersonnalisation ». Le CCNE précise ensuite les contours du consentement, une notion connue des soignants depuis la loi Kouchner de 2004, mais dont les implications concrètes...
Le mal-être des étudiantes sages-femmes perdure
TweetAprès la crise du Covid-19 et la crise que connaît l’ensemble de la profession, comment vont les étudiantes en maïeutique ? Selon la deuxième enquête sur le bien-être des apprenties sages-femmes, initiée par l’Association nationale des étudiantes sages-femmes de France (Anesf) en 2023, les constats sont « tout aussi alarmants qu’en 2018 ». Dans son étude publiée le 3 avril, l’Anesf précise que « les différents résultats pour la plupart n’ont soit pas évolué soit empiré » et évoque « une crise sans précédent ». L’enquête, menée auprès de toutes les étudiantes sages-femmes de France du 23 janvier au 20 février inclus, par mail et sur les réseaux sociaux, a récolté –2 241 réponses. PRÉCARITÉ ET MALTRAITANCE L’étude analyse la situation matérielle et financière des étudiantes de la filière. Un tiers considèrent ainsi que leur situation financière est mauvaise, voire très mauvaise, et neuf étudiantes sur dix se considèrent comme dépendantes ou particulièrement dépendantes financièrement. Par ailleurs, 87,5 % d’entre elles nécessitent une aide financière de leur famille ou d’un tiers. Elles sont aussi 29 % à déclarer avoir une activité rémunérée en période scolaire, dont près de 36 % considèrent cette activité comme étant nécessaire. Pour l’Anesf, le rythme des études ne permet pas de travailler en parallèle, contrairement à la population générale étudiante au sein de laquelle 40 % des jeunes ont un emploi alimentaire. L’Anesf s’est aussi penchée sur le vécu de la formation. Huit étudiantes sur dix se sentent plus stressées depuis l’entrée en formation. Elles sont en outre 21 % à confier avoir déjà subi des traitements inégalitaires ou des discriminations. Une étudiante sur trois ne se sent pas ou peu accompagnée par l’équipe pédagogique. Pis, 61 % rapportent de la maltraitance en stage, essentiellement psychologique (72,2 %), mais aussi verbale (26,5 %), voire physique (1,2 %). Dans ces conditions, les études ont un impact sur la santé des étudiantes. Ainsi, 86 % déclarent ne pas avoir...