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Pratiques

Accoucher en méditant

Une petite révolution serait-elle en cours dans l’univers des méthodes de préparation à la naissance et à la parentalité ? « Sincèrement, oui », répond Céline Puill, sage-femme libérale à Fontenay-sous-Bois, en région parisienne. Comme quelques-unes de ses consœurs, elle est en passe de terminer son diplôme universitaire (DU) de MBCP, acronyme de Mindfulness Based Childbirth and Parenting, autrement dit « naissance et parentalité basées sur la pleine conscience ».Il s’agit de cet état d’attention extrême portée sans jugement au moment présent, sans fantasmer le futur ni ruminer le passé. Pour y parvenir, on s’y entraîne le plus souvent par la méditation. Céline Puill, qui fait partie de la première promotion de professionnels de la périnatalité formés en France insiste : « Je ne connais aucune autre méthode de préparation aussi bien organisée, avec des résultats prouvés scientifiquement, soutenue par Santé publique France. » Elle s’est pourtant déjà formée à la préparation à la mode De Gasquet, à la sophrologie, à la méthode Bonapace, aux enseignements de Jacqueline Lavillonière, sans compter toute la littérature venue nourrir sa pratique. À Santé publique France (SPF), Thierry Cardoso, responsable de l’unité Périnatalité et Petite Enfance à la direction de la prévention et de la promotion de la santé, reconnait « la rigueur, le sérieux et l’évaluation scientifique de ce programme ». Il y participe via l’enseignement. Mais lui parle plutôt d’une « intervention de prévention précoce en périnatalité ». « C’est rarissime de trouver des interventions de prévention précoce avec autant de publications scientifiques et une dynamique de recherche internationale aussi riche, appuie le médecin de SPF. Dans le domaine de la périnatalité, les effectifs restent petits. On n’est pas encore au stade de la méta-analyse. Mais la recherche sur les effets de la pleine conscience et de la méditation existe depuis une quarantaine d’années. Aujourd’hui, on comptabilise plus de 20 000 papiers scientifiques ! C’est assez extraordinaire. Par exemple, la […]

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Grand Angle

Quelle place pour le déclenchement en ambulatoire ?

« Nous avons quinze ans de retard sur le déclenchement en ambulatoire », affirme Patrick Rozenberg, chef du service de gynécologie-obstétrique de l’Hôpital américain à Paris. Le déclenchement étant une intervention médicale, il a longtemps été jugé nécessaire de le réaliser à l’hôpital. C’est ce que préconisent toujours les dernières recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS) de 2009. Mais alors que les taux augmentent, en partie depuis l’étude Arrive de William Grobmann, l’institution se préoccupe du poids organisationnel et financier des déclenchements (voir p. 22-25). L’ambulatoire est alors présenté comme une option avantageuse. Il s’agit de proposer à des femmes de rentrer chez elles une fois la maturation cervicale initiée à l’hôpital et après une surveillance fœtale de quelques heures. Quelques pays en ont l’expérience, à des échelles inconnues. EXPÉRIENCES ÉTRANGÈRES Au Danemark, le protocole de l’hôpital universitaire Aarhus a été testé depuis 2013. Il est utilisé en intrahospitalier comme en ambulatoire, étant alors réservé aux grossesses uniques sans complication à partir de 41 SA. Il consiste à administrer une première dose de misoprostol oral à 25 µg à l’hôpital, puis la patiente rentre chez elle et prend jusqu’à 5 comprimés en 24 heures, à raison de 1 toutes les 2 heures le premier jour. Le « protocole Aarhus » prévoit une évaluation à l’hôpital à J2 puis à J3, avec une prise maximale de 8 doses à J2 et de 3 doses à J3. En 2016, Rikke Helmig a mené un audit de ce protocole auprès de 976 femmes, dont 70 % ont été déclenchées en mode ambulatoire. Sa conclusion, publiée en 2020 dans Acta Obstetrica et Gynecologica Scandinavia, reconnait que la faiblesse de l’effectif ne permet pas de statuer sur la sécurité du procédé.  En République tchèque, un essai a randomisé 339 -patientes pour tester la méthode du dilatateur cervical osmotique hygroscopique (Dilapan®) en intrahospitalier et en ambulatoire. L’unique but […]

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Grand Angle

Maturation cervicale : à chacun sa méthode

« Nul ne maîtrise la question de la maturation cervicale », résume Olivier Morel, du CHU de Nancy. De fait, les pratiques sont hétérogènes. En 2019, l’étude Medip, de l’unité Epopé de l’Inserm, a dressé l’état des lieux sur l’année 2015. Si la majorité des déclenchements se déroulaient alors sur col favorable, sous perfusion d’oxytocine, les prostaglandines vaginales (gel et Propess®) étaient largement utilisées, devant le ballonnet, en cas de col défavorable. Depuis le ballonnet a gagné du terrain et l’autorisation de mise sur le marché (AMM) d’un traitement oral à base de misoprostol a changé la donne. L’ARRIVÉE DU MISOPROSTOL ORAL L’année 2018 a en effet marqué un tournant. En mars, le Cytotec® est retiré de la vente. Ce traitement à base de misoprostol à 200 µg n’avait pas d’AMM dans l’indication de déclenchement. Certains établissements l’employaient, reconditionné ou non par la pharmacie centrale, par voie vaginale. Puis, en mai 2018, -l’Angusta®, comprimé oral de misoprostol à 25 µg, obtient une AMM pour le déclenchement à la faveur d’une procédure de reconnaissance mutuelle européenne, qui veut qu’un médicament autorisé par certains pays le soit dans toute l’Europe. Pour la Haute Autorité de santé, l’Angusta® a sa place dans le déclenchement sur col défavorable, « uniquement en cas de situation médicalement justifiée, lorsque les autres moyens de déclenchement (…) ne sont pas disponibles ». Depuis, l’Enquête nationale périnatale de 2021 donne un aperçu des changements de pratiques. Au total, 69 % des déclenchements ont nécessité une maturation cervicale. La dinoprostone vaginale semble en perte de vitesse, utilisée encore dans 48,7 % des cas. Le recours au ballonnet est plus fréquent, concernant 23,9 % des cas, tandis que l’usage de l’Angusta® est en progression, employé dans 17,2 % des déclenchements. Enfin, le gel de prostaglandine est utilisé dans 9,7 % des cas. Comment les équipes choisissent-elles ? « Les méta-analyses de la Cochrane, regroupant […]

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Grand Angle

« Consentir n’est pas choisir »

Préfacé par Philippe Cornet, professeur de médecine et docteur en sociologie à l’Université de la Sorbonne, l’essai de Claudine Schalck et Raymonde Gagnon dissèque l’étude French Arrive pour, en réalité, dénoncer plus largement la politique du déclenchement à 39 SA de femmes en bonne santé. Pour les autrices, cette pratique, déjà répandue aux États-Unis et qui débute en France, fait du corps féminin un objet défaillant et à risque, une fois de plus dans l’histoire médicale.  Laissant la critique méthodologique de côté, elles ont choisi l’approche interactionniste en psychologie du travail pour analyser ce qui est à l’œuvre lors d’un accouchement entre les acteurs, femmes et soignants, et dans une recherche comme French Arrive. Cette approche tente d’éclairer la dimension subjective des comportements pour comprendre « ce qui profite vraiment à chacun ». « En psychologie du travail, nous prenons toujours un matériel actuel, et non du passé, explique Claudine Schalck. Or French Arrive est une étude toujours en cours. » Les deux sages-femmes rappellent qu’un accouchement implique une coactivité de soins entre soignants et soignés. La subjectivité est impliquée et le soin et la santé ne sont pas « réductibles à une simple logique médicale ». « Or les seules activités qui ne comptent pas sont celles des femmes, parce que ces activités ne sont pas définies comme un travail », dénonce Claudine Schalck. Au final, le dispositif de recherche, même s’il interroge une pratique, « vient dire aux femmes où, quand et comment elles doivent accoucher ». Sans surprise, l’essai des deux sages-femmes et surtout sa mise en exergue dans un éditorial de Richard Horton dans le Lancet du 3 décembre 2022 ont indigné les investigateurs de l’étude French Arrive, qui ont demandé et obtenu un droit de réponse dans le Lancet. DROITS DE RÉPONSE « Contrairement aux accusations portées contre nous, nous sommes préoccupés par la mise en œuvre d’une […]

Grand Angle

Déclenchement à 39 SA sans indication médicale : la cacophonie française

L’étude Arrive de William Grobmann, parue en 2018 dans le New England Journal of Medecine, a fait l’effet d’une bombe. L’essai s’interrogeait sur le déclenchement électif à 39 SA pour les femmes à bas risque, cherchant à vérifier s’il réduisait les complications néonatales et augmentait le taux de césarienne. Il n’a été concluant que sur ce dernier point, mais les pratiques américaines en ont déjà été affectées. En France, les médecins ne tirent pas tous les mêmes conclusions pratiques de cet essai. Pour comprendre les débats tels que posés par les obstétriciens, un retour historique est nécessaire. LE CONTEXTE AMÉRICAIN « Aux États-Unis, depuis les années 2010, l’accent a été mis sur la limitation des morts fœtales in utero (MFIU), en raison de l’importance prise par les spécialistes de la médecine maternofœtale, témoigne Eugène Declercq, professeur de sciences de la santé communautaire à l’École de santé publique de l’Université de Boston. Avant, de 2009 à 2014, l’accent était mis sur la réduction de la prématurité dite tardive (entre 34 et 36 SA). L’association March of Dimes avait mené des campagnes en faveur de la “règle des 39 SA” pour prévenir les interventions sans indication médicale. » En 2013, l’étude d’Alicia Mandujano, qui a comparé le risque de mort fœtale entre 34 et 41 SA avec le taux de mortalité néonatale pour évaluer le meilleur moment pour accoucher, témoigne de cette nouvelle préoccupation concernant les MFIU. Elle a étudié des grossesses uniques entre 2003 et 2005, classifiées entre bas et haut risque. Son article « The risk of fœtal death : current concepts of best gestational age for delivery », publié dans l’American Journal of Obstetrics and Gynecology, conclut que « le nombre de morts fœtales qui pourraient être évitées par un accouchement est supérieur aux taux de décès néonatal entre 37 et 38 SA chez les grossesses à bas risque ». L’étude […]

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Actus

« En prison, les femmes sont très isolées », par Céline Marchand

Quelles sont vos activités à la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis ? Mon objectif principal est de m’occuper des femmes enceintes. Depuis 1994, le suivi des femmes enceintes incarcérées dépend d’un hôpital de proximité. Je suis employée par l’hôpital de Corbeil-Essonnes, affectée à temps partiel à l’unité de consultations et de soins ambulatoires (Ucsa), qui se situe à l’intérieur de la prison. En plus d’assurer le suivi des femmes enceintes, je fais un peu de suivi gynécologique. Les femmes qui me connaissent sont demandeuses. J’y suis présente trois demi-journées par semaine. Avec une conseillère familiale du département, nous organisons également des ateliers mensuels d’éducation à la sexualité.  Qui sont les femmes que vous rencontrez ? Il y a environ 300 femmes, mais avec la crise sanitaire, leur nombre a fortement chuté. Les bâtiments sont très vétustes. Les femmes peuvent être jusqu’à six par cellule, avec des lits superposés. À côté, il y a une unité spéciale : la nurserie. C’est un lieu fermé, complètement séparé du reste de la prison, qui se situe à l’opposé de l’Ucsa, où je reçois les dames. Elles y vont à partir de six mois de grossesse. Il y a douze cellules individuelles, plus grandes que les cellules collectives. Celles qui gardent leur enfant y reviennent avec lui après leur accouchement. Peu de prisons sont équipées de ce type de service. La nurserie de Fleury-Mérogis est la plus grande de France. Les autorités pénitentiaires y transfèrent parfois des femmes de très loin : de toute la France, y compris des Antilles. Il y a des prévenues en attente de leur jugement et des femmes déjà condamnées. Avant, il y avait beaucoup de femmes punies pour des petits délits. Leurs peines étaient assez courtes, de quelques mois. Quand elles étaient enceintes, elles pouvaient sortir avant d’accoucher. À mes débuts, j’ai suivi une […]

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Point juridique

Compétences des sages-femmes : dernières évolutions

Selon le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2023, les sages-femmes pourront prescrire et administrer des vaccins à d’autres personnes que les femmes enceintes, leur entourage et les enfants. Si les modalités doivent être fixées par décret, un point précis mérite d’être fait sur les compétences actuelles des sages-femmes, car elles évoluent sans cesse.  Vaccinations, dépistages et traitements : des compétences étendues  La liste de médicaments et des dépistages que peuvent prescrire les sages-femmes a été modifiée et actualisée par deux décrets du 5 mars 2022 [1, 2] afin de « compléter l’arsenal thérapeutique indispensable et nécessaire dans le cadre de la gynécologie de prévention, notamment en termes de prescriptions des anti-infectieux pour les femmes, mais aussi pour leurs partenaires ». Les sages-femmes peuvent désormais : En ce qui concerne les vaccins, le décret du 21 avril 2022 relatif aux compétences vaccinales des sages-femmes [3] et l’arrêté du 12 août 2022 modifiant l’arrêté du 1er mars 2022 fixant la liste des vaccinations que les sages-femmes sont autorisées à prescrire et à pratiquer [4] ont étendu les compétences vaccinales des sages-femmes. Les sages-femmes peuvent prescrire et pratiquer les vaccins comme indiqué dans le tableau page 40.  Les sages-femmes peuvent également prescrire et pratiquer chez les nouveau-nés : Des exceptions sont à noter pour les personnes immunodéprimées qui ne peuvent être vaccinées par une sage-femme avec des vaccins vivants atténués (ROR, fièvre jaune, zona). Femme Nouveau-né Entouragede la femme enceinte Enfant mineur Rougeole-Oreillons-Rubéole X X X X Tétanos X X X X Diphtérie X X X X Poliomyélite X X X X Coqueluche X X X X Hépatite B X X X X Pneumocoque X X Grippe X X HPV X X Méningocoque C X X X Méningocoque B X Varicelle X Haemophilus Influenzaede type B X X BCG X Rage X Zona X Fièvre jaune X IVG : […]

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Pratiques

Vers des restrictions de visite pérennes ?

À la maternité des Diaconesses, à Paris, la réflexion sur les restrictions de visite est antérieure à la crise du Covid-19. En 2009, à l’occasion de l’épidémie de grippe H1N1, des limitations drastiques sont instaurées. Seules les visites du co-parent sont permises. Par la suite, constatant un meilleur repos mère-enfant, les équipes décident de rouvrir à tous les droits de visite mais de limiter les horaires autorisés. Ils sont fixés entre 16 h et 20 h, pour protéger le temps de la sieste.  CALME IMPOSÉ « Le personnel informe aussi les visiteurs qu’ils ne doivent rester que 15 à 20 minutes,explique Laurence Pavie, alors sage-femme coordinatrice. Une femme peut avoir besoin d’allaiter en privé, de changer ses protections et n’a pas besoin de gens qui s’incrustent pour poser des tas de questions. » Avec la crise du Covid, passé le temps des restrictions totales, le service décide de restreindre davantage son ouverture. Depuis septembre 2022, seuls la fratrie et le co-parent sont autorisés. « Nous avons tenté de rouvrir plus largement, mais les débordements ont été trop importants, témoigne Laurence Pavie. Les femmes ne réclament pas tant d’autres visiteurs. Comme elles restent peu en maternité, elles n’ont pas d’urgence à les voir dans l’établissement et peuvent donner rendez-vous lors de leur retour à domicile. Si le co-parent est absent, un autre proche est autorisé à venir. Il nous semble plus simple que le service impose des restrictions, car les femmes ont du mal à dire non et sont prises dans des jeux de loyauté familiale. » Pourtant, lors du premier confinement de mars 2020, les témoignages de femmes perturbées par les restrictions sévères de visite pullulent dans les médias. De leur côté, les professionnelles de terrain constatent un calme bienvenu en suites de couches, propice au repos des mères et des bébés. L’année suivante, trois […]

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Formation

Pourquoi et comment réduire l’exposition materno-fœtale aux polluants chimiques perturbateurs endocriniens ?

Pr Patrick Fénichel abd, Dre Thérèse Greck cd a Gynécologue/Endocrinologue CHU Nice, 170 chemin de l’Adret La Gaude 06610. Fenichel.p@chu-nice.fr b Professeur émérite Université Côte d‘Azur  c Gynécologue/Endocrinologue Montpellier d MEDEA Organisme de formation habilité à dispenser des actions labellisées DPC : Environnement et Périnatalité.www.medea.fr Résumé : Des travaux épidémiologiques et expérimentaux de plus en plus nombreux suggèrent que l’environnement périconceptionnel maternel, voire paternel, joue un rôle déterminant sur l’état de santé à venir de l’enfant. Les polluants chimiques à activité de perturbateurs endocriniens en mimant, bloquant ou perturbant l’action des hormones sur le développement fœtal sont ainsi susceptibles via des modifications épigénétiques de favoriser la survenue de maladies chroniques. Réduire l’exposition fœtale en délivrant des conseils simples et pratiques à la future mère lors d’une consultation préconceptionnelle devrait par conséquent constituer un objectif prioritaire en médecine préventive périnatale. Mots-clés : exposition maternelle ; micro-environnement fœtal, perturbateurs endocriniens, DOHAD, les 1000 jours, consultation préconceptionnelle Introduction L’examen attentif des registres de naissance dans les hôpitaux de zones industrielles britanniques plutôt défavorisées a permis, dans les années 80, à un épidémiologiste anglais, David Barker, de mettre en évidence une corrélation inverse très significative entre l’hypotrophie fœtale ou retard de croissance intra-utérin (identifiée par une réduction du poids de naissance normalisé pour l’âge gestationnel) et le risque de survenue, plusieurs décennies plus tard, de maladies métaboliques (obésité, diabète de type 2) et/ou de complications cardiovasculaires sévères (1). C’est l’environnement fœtal délétère (désordres nutritionnels et métaboliques de la mère, stress, tabac…) à l’origine de l’hypotrophie fœtale qui est responsable, via des modifications épigénétiques, du risque majoré à venir (figure 1 page 32).  De nombreux travaux expérimentaux et épidémiologiques ont ensuite confirmé l’hypothèse de Barker conceptualisée sous le nom de DOHAD (Origine développementale des pathologies chroniques adultes) (2). Ainsi chez le rongeur, il a été montré qu’indépendamment de toute susceptibilité génétique, l’hyperglycémie ou la carence […]

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Formation

Quand l’objectif n’est pas de nourrir de lait, mais d’amour !

EXPOSÉ Lors d’un précédent cas clinique (voir Profession Sage-Femme n° 282 – Juin 2022), je vous avais présenté la situation d’Ingrid*, à qui un cancer mammaire avait été diagnostiqué à la suite d’une mastite. Suite à ce diagnostic, la prise en charge de ce cancer a nécessité une mastectomie. À ce stade, Ingrid avait déjà sevré son bébé depuis plusieurs mois, mais elle a consulté afin de pouvoir avoir un avis quant à la possibilité d’un allaitement ultérieur. Nous avions alors pu parler de la possibilité d’allaiter avec un seul sein. Ingrid se demandait alors s’il serait possible de mettre son bébé au sein reconstruit même s’il n’y avait pas de lait. Elle voyait cela comme une sorte de revanche sur la mastectomie. Nous avions alors évoqué la possibilité d’une mise au sein à l’aide d’un dispositif d’aide à l’allaitement (DAL), avec ou sans bout de sein en silicone, en fonction de ce qui serait le plus confortable pour elle. Elle semblait rassurée de savoir qu’une possibilité lui était offerte. Ingrid consulte deux ans plus tard. L’objectif de cette entrevue est de revenir sur l’idée émise deux ans plus tôt. Une nouvelle mastectomie du sein controlatéral était programmée du fait d’une masse tumorale détectée lors des examens de surveillance. Une reconstruction était également envisagée et Ingrid, qui se projetait dans une future nouvelle maternité, évoquait sa tristesse de ne pas pouvoir revivre le contact physique inhérent à l’allaitement. Elle devait déjà faire le deuil de pouvoir donner son lait à un futur bébé, mais souhaitait ne pas devoir renoncer à ce contact physique, charnel. Sa demande était donc la suivante : « Nous avions parlé d’utiliser un DAL sur le sein reconstruit il y a deux ans. Pensez-vous qu’il serait possible d’envisager un “allaitement au DAL” sur les deux seins ? » Une telle situation […]