À quelles situations réserver les touchers vaginaux et les examens au spéculum ? La littérature reste pauvre sur le sujet, témoin d’un manque d’intérêt ancien des professionnels concernant une pratique qui met pourtant les femmes mal à l’aise en consultation. Mais un groupe de travail pluridisciplinaire s’est penché sur la question pour émettre des recommandations pour la pratique clinique (RPC). « Des recommandations existaient déjà, éparpillées au sein d’autres RPC thématiques, témoigne le professeur Xavier Deffieux, qui a coordonné le groupe de travail. Mais toutes les situations n’étaient pas englobées et nous souhaitions rassembler les bonnes pratiques pour les rendre visibles, dire comment nous travaillons et rassurer les patientes. » Face au contexte médiatique de plaintes contre le professeur Daraï et de dénonciations des violences gynécologiques et obstétricales, il s’agissait en effet de faire retomber l’inquiétude des femmes et d’harmoniser les pratiques. « Le vécu de l’examen est parfois difficile, certaines femmes le redoutent et évitent la consultation gynécologique, poursuit le professeur de l’hôpital Antoine-Béclère de Clamart. Nous devions déterminer dans quelles situations l’examen est justifié, pour éviter les examens inutiles et montrer le bien-fondé de la prise en charge. » Différentes positions peuvent être proposées lors de l’examen pelvien, pour le confort des patientes. © D.R. MOINS DE SYSTÉMATIQUE Les Collèges des gynécologues et obstétriciens, des enseignants de gynécologie obstétrique, des enseignants de gynécologie médicale, des sages-femmes, de la médecine générale, de même que la Fédération nationale des collèges de gynécologie médicale, le Conseil national professionnel de gynécologie et obstétrique et gynécologie médicale et la Société de chirurgie gynécologique et pelvienne, en collaboration avec le Collectif interassociatif autour de la naissance et l’association d’usagers Endofrance ont planché pendant près d’un an pour aboutir à un consensus. Répondant à 26 questions, ils ont étudié l’intérêt clinique de l’examen pelvien dans le suivi gynécologique, pendant la…
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L’examen pelvien et le viol
TweetLa très médiatique « affaire Daraï » a éclaté en septembre 2021. Aujourd’hui, le professeur Émile Daraï, spécialiste de l’endométriose de 66 ans, est mis en examen pour « violences volontaires par personne chargée d’une mission de service public », suite aux plaintes de 32 patientes qui l’accusent d’avoir pratiqué des touchers vaginaux et rectaux de manière brutale et sans consentement lors de ses consultations. Le professeur Daraï n’est pas mis en examen pour viol, bien que les femmes ayant subi ces violences considèrent que c’est bien ce dont il s’agit et qu’elles aient globalement porté plainte pour viol, voire viol en réunion et viol sur mineur par personne ayant autorité. LES ÉLÉMENTS MATÉRIELS DU VIOL Mais les actes médicaux peuvent-ils être considérés comme des viols ? La loi définit le viol à l’article 222-23 du Code pénal comme suit : « Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la personne d’autrui ou sur la personne de l’auteur par violence, contrainte, menace ou surprise est un viol. Le viol est puni de quinze ans de réclusion criminelle. » Il n’est pas nécessaire qu’il y ait des violences physiques pour qualifier un acte de viol. Il suffit que la victime n’ait pas donné son consentement clair et explicite. Il s’agit par exemple des situations suivantes : • la victime a émis un refus clair et explicite et/ou s’est défendue, mais l’agresseur a exercé sur elle une contrainte physique (par exemple, agression sexuelle ou viol commis avec violence) ; • la victime n’a pas émis un refus clair et explicite et/ou ne s’est pas défendue, car elle faisait l’objet d’une contrainte morale (par exemple, agression sexuelle d’un ou d’une salariée par son chef) ; • la victime n’était pas en état de pouvoir donner une réponse claire (par exemple, victime sous l’emprise de stupéfiants ou de...




Entretien avec Élise Marcende : « Nous proposons notre regard de femmes ayant traversé la dépression maternelle »
TweetQu’avez-vous souhaité apporter avec ce livre ? Les livres de témoignages datent d’il y a plusieurs années déjà. L’ouvrage d’Iliana Weizman, que nous citons, est davantage un essai traitant du post-partum. D’autres ouvrages plus théoriques sur la dépression post-partum développent les connaissances sur le sujet en psychologie et en psychiatrie. Or nous avons souhaité aborder la souffrance maternelle en tant que personnes concernées qui en sont sorties, pour apporter un vécu entre pairs et parler entre femmes. Par ailleurs, Larousse, notre éditeur, souhaitait un ouvrage accessible au plus grand nombre, aux femmes, mais aussi à leur entourage et aux professionnels de santé. Nous avons donc écrit à quatre mains et prévu des encadrés et encarts spéciaux à leur intention. Nous abordons bien sûr les aspects théoriques, dans un premier chapitre qui pose les différentes notions, et nous rappelons les livres parus sur le quatrième trimestre de la grossesse, le mois d’or, le burnout parental, le regret maternel, etc. Mais notre regard est celui de femmes ayant traversé la dépression périnatale pour moi-même et postnatale pour Chloé Bedouet. Notre objectif est très pratique. Il ne s’agit pas de donner des conseils aux femmes, car chaque situation est unique et elles sont déjà submergées par de nombreuses injonctions. Nous souhaitons davantage donner des pistes de réflexion et de soutien. Sur la question de l’isolement des mères en post-partum par exemple, nous donnons de nombreuses ressources, évoquons les professionnels à l’écoute ou les associations susceptibles de guider ou d’accompagner les femmes. Nous n’avons pas de solution toute faite, chacune peut y piocher ce qui lui convient. Concernant les facteurs de risque, nous avons pris le parti de les mentionner dans leur totalité, car différentes écoles cohabitent. Le dernier chapitre est consacré à l’après, car il était primordial d’insister sur le fait que la dépression...




Réduire la mortalité maternelle : un défi pour le monde
Tweet Toutes les deux minutes, une femme meurt pendant la grossesse ou l’accouchement, selon le rapport Trends in maternal mortality publié par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) le 23 février dernier. Plusieurs instances des Nations Unies ont planché pour affiner les données disponibles jusque là. DES PROGRÈS QUI STAGNENT Ces nouvelles estimations sont donc les plus à jour pour la période 2000-2020 et permettent des comparaisons internationales, régionales et nationales. L’analyse souligne surtout que les progrès pour réduire la mortalité maternelle ont été accomplis entre 2000 et 2015, avant de ralentir ou de stagner entre 2016 et 2020. En l’an 2000, le monde comptabilisait 446 000 décès maternels. En 2020, leur nombre est estimé à 287 000 dans le monde, soit une légère baisse par rapport aux 309 000 décès enregistrés en 2016. Le taux moyen annuel de réduction de la mortalité maternelle est passé de 2,7 % entre 2000 et 2015 avant de s’effondrer à – 0,04 % par an depuis 2016. Le tournant correspond pourtant à la date à laquelle les objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies sont entrés en vigueur, preuve qu’il faut sans cesse rabâcher la nécessité d’investir dans la santé sexuelle et reproductive des femmes. L’ODD 3.1 entend faire passer la mortalité maternelle sous le seuil des 70 décès pour 100 000 naissances vivantes dans 7 ans, d’ici 2030. Concernant un éventuel effet-Covid sur ces tendances, les statistiques sont claires : la stagnation des progrès est antérieure à la pandémie et cette dernière n’en est qu’un des multiples facteurs. « Ces nouvelles statistiques montrent la nécessité urgente de garantir à chaque femme et à chaque fille un accès à des services de santé essentiels avant, pendant et après l’accouchement, et la possibilité d’exercer pleinement leurs droits en matière de procréation », a d’ailleurs martelé Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l’OMS à la sortie du rapport. Si...