Grand Angle

À Privas, la maternité va fermer

À Privas, en Ardèche, la maternité va fermer. À moins d’un coup de théâtre, les femmes ne devraient plus accoucher dans ce service du Centre hospitalier des Vals d’Ardèche (CHVA) à partir du 1er août 2019. À la place, un Centre périnatal de proximité (CPP) devrait ouvrir ses portes, même si l’ARS Auvergne-Rhône-Alpes refuse encore de le reconnaître. Mais avant cela, l’équipe doit traverser les affres de la mutation et le deuil de sa maternité. Sans aucun dialogue avec leur tutelle, les professionnels de la maternité sont en souffrance. Sous couvert d’anonymat, plusieurs d’entre eux, à qui l’on a interdit de communiquer sur le sujet, ont accepté de témoigner. Des accouchements en baisse Depuis de longues années, la maternité se trouve sous la barre fatidique des 300 accouchements par an, seuil fixé par le décret de périnatalité de 1998 en deçà duquel les maternités doivent être fermées, sauf exception géographique. Le nombre d’accouchements a progressivement baissé, passant de 263 en 2014 à 183 en 2018. Sur les 5 premiers mois de cette année, seuls 56 accouchements ont eu lieu. « Les patientes savent que la maternité est sur la sellette. Elles nous ont désertés. Elles ne supportent pas cette incertitude. Les multipares continuent à accoucher chez nous, mais les primipares prennent peur. » La maternité de Privas est dans le collimateur des autorités sanitaires depuis plusieurs années. Dès 2017, la Cour des comptes préconisait sa transformation en CPP. Dans un rapport de la Chambre régionale des comptes d’Auvergne-Rhône-Alpes, rendu public début 2017, qui porte sur l’analyse des exercices du CHVA de 2010 à 2014, les auteurs soulignent que l’hôpital « dessert un bassin de population étendu mais faiblement peuplé (50 000 habitants), rural et vieillissant. (…) Privas se situe à 35 minutes des maternités de Valence (35 km), 41 minutes de celle de Montélimar […]

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Maternité de Die. Après la fermeture

Pendant des années, on n’avait aucun projet, sauf attendre une éventuelle fermeture, raconte l’auxiliaire de puériculture Élodie Borel. Ouvrir le CPP [Centre périnatal de proximité, ndlr] a été angoissant, mais aussi très stimulant. » Globalement, après les affres des dernières années de fonctionnement et le deuil de la maternité (Lire ici), l’équipe semble épanouie. Rapide, la transition a été difficile, mais très accompagnée par l’équipe de Valence. Après plus d’un an de recul, les plâtres ont été essuyés. Un bilan a même été dressé. Avec des surprises : si le fonctionnement global de la structure et les différents risques liés au déplacement de l’accouchement dans une maternité plus éloignée ont été anticipés, les femmes ne suivent pas toutes la voie tracée par les professionnels. UN AUTRE LIEN AUX PATIENTES « L’information que la maternité avait fermé a très bien circulé. Mais ça n’a pas été de même pour l’ouverture du CPP », regrette la sage-femme Nadine Billy. La fréquentation du centre est restée faible pendant le premier trimestre 2018. Au total, sur l’année 2018, « il y a eu 3042 consultations, pour une file active de 1125 personnes, dit Sabrina Bottet. C’est beaucoup. » Sage-femme coordonnatrice de la maternité de Valence, 20 % de son temps de travail est dédié au CPP de Die. « Pas mal de choses ont été mises en place au niveau du suivi des grossesses, explique la sage-femme Agnès Juvin. L’offre du CPP est supérieure à celle de notre ancienne maternité. Nous assurons aussi des consultations de gynécologie, ce que nous ne faisions pas avant. Aujourd’hui, je vois la femme dans toute sa problématique. Cela favorise le lien. » Un sentiment partagé par l’auxiliaire de puériculture Élodie Borel : « À la maternité, on créait des liens très forts, mais on ne voyait pas les […]

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Maternité de Die : chronique d’une fermeture annoncée

« Quand j’ai postulé à la maternité en 1986, le directeur de l’hôpital m’a appelée pour me prévenir que le service allait fermer, raconte Agnès Juvin, qui fait désormais office de sage-femme coordinatrice au Centre périnatal de proximité (CPP) de Die. J’étais jeune, j’avais envie de bouger, même si ce n’était que pour deux mois. Alors je suis venue. J’ai pris mon poste en novembre 1986. » La maternité a fermé ses portes le 29 décembre 2017, plus de 33 ans après cette première annonce. Aujourd’hui, la sage-femme compte parmi les anciennes de l’équipe. Elle a mené l’essentiel de sa carrière dans la plus petite maternité de France métropolitaine. En 2016, 117 bébés y sont nés. Pour les habitants, fortement mobilisés, la fermeture de la maternité jouait donc l’arlésienne depuis plus de trois décennies. Si bien que la confirmation de l’événement a fait l’effet d’un coup de massue, la décision de non certification de l’hôpital, rendue par la HAS en octobre 2017, ayant peu été médiatisée. Sur place, l’équipe apprend la nouvelle par voie de presse. « Fin novembre 2017, nous savions qu’il y avait une réunion à l’ARS avec plusieurs élus et qu’une conférence de presse était prévue ensuite, raconte l’auxiliaire de puériculture Élodie Borel. En début d’après-midi, j’ai cherché l’info sur France Bleu et j’ai vu que le couperet était tombé. Ça m’a fait un choc. J’ai prévenu le reste de l’équipe. Ensuite, ça a été le silence radio. Personne. Le désert. Pas un seul cadre n’est venu. Aucune nouvelle de l’administration. Puis, nous avons reçu un appel téléphonique de la sage-femme coordonnatrice de Valence. » L’équipe n’a qu’un gros mois pour transformer la maternité en CPP. EXCEPTION GÉOGRAPHIQUE ? L’exception géographique qui a contribué à maintenir cette petite maternité si longtemps n’a donc pas suffi. Pourtant, la […]

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Ici et ailleurs

“La profession de sexologue n’existe pas”

La sexologie est-elle une spécialité ? Officiellement, les diplômes de sexologie, qui sont des diplômes interuniversitaires nationaux, ne sont pas professionnalisants. La sexologie n’est donc pas une spécialité et le métier de sexologue n’est pas ce qu’on appelle une profession initiale. La sexologie est une complémentarité de formation. C’est important de le souligner à l’heure actuelle, où il y a un débordement et où de plus en plus de personnes se déclarent sexologues sans formation spécifique dans le champ de la santé sexuelle. Il faut dire que le titre n’est pas protégé. Dans ce contexte, les personnes ayant suivi un DIU de sexologie ne doivent pas se revendiquer uniquement sexologues, mais décliner leur profession initiale, dont le terme sexologue n’est que le qualificatif. Elles indiquent ainsi qu’elles ont été formées à la sexologie. Pour être membre titulaire de l’Association interdisciplinaire postuniversitaire de sexologie (Aius) et participer à l’évolution de l’association, en plus d’être adhérent de l’association et de participer aux congrès, il faut être médecin, sage-femme, pharmacien, kinésithérapeute, infirmier ou psychologue et avoir été formé à la sexologie. Autrement dit, il faut être un professionnel du soin, de l’éducation ou de l’accompagnement, comme les conseillers conjugaux, les assistantes sociales ou les éducateurs à la santé sexuelle. Tous les professionnels qui peuvent avoir accès au sexe ou à la sexualité des personnes sont concernés.

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Pratiques

Un Grand Prix Évian 2018 entre pairs

Créé en 1992, le Grand Prix Évian des écoles de sages-femmes a tenu sa 27e édition à Paris le 28 septembre dernier. Six lauréates étaient en lice, sélectionnées par le jury parmi 38 synopsis de mémoires adressés par les écoles, sur quelque 900 mémoires soutenus en 2018. Cette sélection ne représente pas les meilleurs mémoires de France, mais un échantillon des travaux de qualité. Les présentations des lauréates ont parfois été l’occasion pour les membres du jury d’adresser des messages plus généraux. UN JURY FÉMININ Le jury 2018 regroupait uniquement des femmes, avec comme présidente Isabelle Derrendinger, directrice de l’école de sages-femmes de Nantes. À ses côtés siégeaient Anne Chantry, enseignante à l’école de Baudelocque et chercheuse à l’Inserm, Martine Chauvière, sage-femme coordinatrice au CH de Saint-Malo, Isabelle Hervo, sage-femme sociologue et Marie-Sophie Chavet, pédiatre à l’hôpital Trousseau à Paris. Pour la première fois, la composition du jury dérogeait à la tradition  : aucun gynécologue-obstétricien n’y siégeait. « Lorsque les organisateurs du Grand Prix m’ont sondée, je leur ai suggéré un jury composé essentiellement de sages-femmes et d’une médecin pédiatre. C’est une façon symbolique de valoriser la profession par les pairs et pour les pairs », souligne Isabelle Derrendinger.

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Recherche

Les obstétriciens, plus interventionnistes

Les obstétriciens sont plus interventionnistes que les sages-femmes. Ce n’est pas une surprise, mais cette fois, c’est une étude de cohorte qui le montre. Mené en Lituanie auprès de 1384 femmes ayant accouché en 2012 et de 1283 femmes ayant donné la vie courant 2014, ce travail démontre un taux de césariennes doublé chez les femmes dont la grossesse et l’accouchement ont été accompagnés par un obstétricien plutôt que par une sage-femme. Toutes les patientes retenues avaient eu une grossesse à bas risque. Qu’elles soient nullipares ou multipares, leur travail était spontané, avec un fœtus singleton en position céphalique. Les scientifiques ont d’emblée exclu les multipares ayant eu une césarienne auparavant. Seule différence notable entre les deux groupes, les femmes qui avaient choisi un obstétricien dès le début de leur grossesse étaient légèrement plus âgées, avec une moyenne de 29 ans contre 28 ans pour celles qui avaient choisi une sage-femme. Résultat : en 2012, le taux de césariennes de la cohorte s’élevait à 4,4 % dans le « groupe sages-femmes », contre 10,7 % dans le « groupe obstétriciens ». En 2014, la différence entre les deux groupes était du même ordre : 5,2 % dans le « groupe sages-femmes » contre 11,8 % dans le « groupe obstétriciens ». Et il en allait de même pour d’autres interventions observées dans la cohorte. En 2012, les patientes suivies par des sages-femmes avaient moins d’amniotomies (27,5 % contre 36,1 % pour le groupe obstétriciens), moins d’oxytocine (27,3 % contre 33,1 %), moins de péridurales (22,6 % contre 33,8 %). Les données de 2014 sont similaires. En revanche, les auteurs n’ont noté aucune différence significative en termes de durée totale du travail, d’épisiotomie ou de déchirures périnéales.

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Chiffres

L’AMP en 2018, et demain ?

En 2018, l’AMP concernera toujours très peu de naissances. En tenant compte du pourcentage d’accroissement de ce mode de conception au cours des dernières années, le chiffre des naissances issues d’AMP en 2018 est estimé à 3,4 %, soit 1 enfant sur 30. Surtout, contrairement à ce que l’imaginaire collectif véhicule, la très grande majorité de ces enfants sont conçus avec les gamètes de leurs deux parents, soit 95 %. Élise de La Rochebrochard, de l’université de Versailles-Saint-Quentin, a mené une analyse pour le compte de l’Institut national d’études démographiques (Ined). Outre un bilan, elle envisage les conséquences d’une ouverture plus grande de l’AMP. LA FIV, REINE DES MÉTHODES Parmi les techniques utilisées en AMP, la Fiv domine largement, représentant 70 % des conceptions, devant les inséminations artificielles. Depuis 1992 et la mise au point de l’injection intra-cytoplasmique de spermatozoïde (ICSI), la Fiv permet de pallier tout autant les infertilités masculines que féminines. Sur la période 2012-2015, 2 Fiv sur 3 recourraient à l’ICSI. D’où son essor. « La proportion d’enfants conçus par Fiv progresse de + 0,5 % tous les 7 à 8 ans. En 2011, 2 % des enfants étaient conçus par Fiv, et si la tendance se poursuit, la proportion atteindra 2,5 % en 2018, soit 1 enfant sur 40 (plus de 20 000 enfants) », précise l’étude. NAISSANCES MULTIPLES Dans les premières années de la Fiv en France, les médecins transféraient quatre embryons ou plus à la fois dans l’espoir d’augmenter les chances d’obtenir une grossesse. Cela concernait 39 % des cas en 1988. Fiv et grossesses multiples ont ainsi été associées au début des années 1990, où il naissait 130 enfants pour 100 accouchements suite à une Fiv.

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Actus

Bébés nés sans bras : une affaire à rebondissements

Toute l’affaire débute en 2014. Le Remera, ou Registre des malformations en Rhône-Alpes, identifie sept cas d’agénésie des membres supérieurs de nouveau-nés, durant la période 2009-2014, dans un rayon de 17 kilomètres autour d’un village de l’Ain. Dans cette même zone, des veaux naissent aussi sans queue. Pour Emmanuelle Amar, qui dirige le Remera, le taux de malformation enregistré est supérieur au taux normalement attendu, à la fois sur une telle période et dans une si petite zone. Cela signe l’existence d’un agrégat spatio-temporel de cas, dénommé aussi cluster. Le Remera prévient aussitôt ses tutelles, dont Santé publique France. PREMIÈRE ALERTE En décembre 2016, soit presque trois ans plus tard, Emmanuelle Amar publie un éditorial dans la revue Environnement, risques et santé pour dénoncer l’absence de réactivité des autorités sanitaires. Elle rappelle alors l’affaire concomitante de la Dépakine, suite à laquelle la ministre de la Santé Marisol Touraine s’était engagée à renforcer la surveillance des malformations congénitales. Concernant les dégâts provoqués par le valproate de sodium, l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) avait dénoncé dans un rapport de 2015 le fait que les données du Remera avaient été ignorées par les instances sanitaires. L’Igas recommandait aussi de pérenniser les financements des six registres des malformations existants. Car ces structures, souvent associatives, ne bénéficient pas de ressources pérennes. En 2017, le Remera apprenait que plusieurs de ses sources de financement ne seraient pas reconduites, selon les informations rapportées par le journaliste Stéphane Foucart, du Monde. C’est d’abord la région Auvergne-Rhône-Alpes qui annonce mettre fin à sa contribution annuelle de 100 000 euros, soit près de la moitié du budget de l’association.

Grand Angle

Les pionnières de la recherche en maïeutique

L’ épisiotomie doit-elle être systématique ? Les perfusions d’oxytocine au cours d’un travail spontané sont-elles en lien avec l’hémorragie du post-partum ? Quel est l’intérêt des postures pendant l’accouchement ? Existe-t-il des corrélations entre les pratiques cliniques et la taille de l’établissement ? L’origine géographique des femmes influence-t-elle leur prise en charge en maternité ? Autant de questions qui démontrent l’intérêt de conduire des projets de recherche en maïeutique. Terme équivalent à celui de midwifery, en anglais, il recouvre l’art des sages-femmes, autrement dit le suivi et la prise en charge des femmes enceintes à bas risques et de leurs bébés. À l’heure de la médecine fondée sur les preuves, la discipline est devenue incontournable. Elle permet de proposer des soins plus adaptés à un moindre coût. Pourtant, en France, les doctorats de maïeutique n’existent pas encore. Pour devenir chercheuses – et le rester -, les sages-femmes françaises ont emprunté des chemins détournés. Leurs bricolages ont cependant réussi à faire émerger la recherche en maïeutique et ont contribué à convaincre de son intérêt. Au point que la maïeutique devrait prochainement être reconnue comme une véritable discipline académique. EN FRANCE, UNE DISCIPLINE INVISIBLE Il était temps. « L’International Confederation of Midwives considère la recherche comme un composant essentiel de la maïeutique depuis les années 1980, rappellent Sophie Goyet et trois de ses consœurs sages-femmes chercheuses, qui signent un article sur le sujet dans la revue britannique Midwifery (1). Aux États-Unis, la recherche en maïeutique a été initiée par des sages-femmes, alors qu’elles devaient apporter les preuves des bénéfices de leurs interventions. Au Royaume-Uni, les sages-femmes étaient sous la pression des femmes qui questionnaient quelques-unes de leurs pratiques habituelles comme les lavements systématiques ou l’épisiotomie de routine. La Suède a commencé la recherche en maïeutique quand les universités ont intégré la formation des sages-femmes, en 1977. D’autres […]

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Fœtus en danger : faut-il signaler ?

« Annoncer aux parents une séparation quand leur bébé vient juste de naître, c’est impensable. Cela bouscule tout le monde. C’est émotionnellement très difficile », raconte Estelle Russeil. Cette éducatrice est coordinatrice entre le service de protection maternelle et infantile (PMI) et celui de l’Aide sociale à l’enfance (ASE), où les enfants peuvent être placés sur décision judiciaire après avoir été séparés de leur famille par mesure de protection. Le poste est rare, mais dans la Vienne (86), c’est elle qui vient chercher les nouveau-nés à la maternité lorsque le procureur de la République, après une alerte des équipes de PMI et de la maternité, estime que l’enfant ne peut pas rester avec sa mère. Les situations peuvent être dramatiques, « avec beaucoup de violence, de cris, de pleurs », poursuit l’éducatrice. Mais depuis quelques années, elle constate que ces séparations se passent mieux que par le passé. À la maternité, la violence a baissé. Elle attribue ce phénomène au protocole mis en place dans son département au sujet de la transmission d’une information préoccupante prénatale : l’IP prénatale. Une sage-femme en est le pivot. Dans le cadre de ce dispositif, présenté lors des dernières journées d’étude de l’Association nationale des sages-femmes territoriales, en juin 2018, à Poitiers, les inquiétudes sont transmises au magistrat avant même la naissance de l’enfant.   Des cas rares Les cas sont plutôt rares. En 2013, avant la mise en place du dispositif, les informations préoccupantes prénatales concernaient 0,3 % des naissances du département. Entre 2014 et 2017, il y a eu 51 IP prénatales, soit 0,27 % des naissances. « Sur les quatre années de recul, les chiffres sont stables », constate Agnès Chauvet, gynécologue-obstétricienne de la PMI de la Vienne, qui a directement participé à l’élaboration du protocole. Dans presque la moitié des cas (46 %), les mères souffraient […]