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Point juridique

Compétences des sages-femmes : dernières évolutions

Selon le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2023, les sages-femmes pourront prescrire et administrer des vaccins à d’autres personnes que les femmes enceintes, leur entourage et les enfants. Si les modalités doivent être fixées par décret, un point précis mérite d’être fait sur les compétences actuelles des sages-femmes, car elles évoluent sans cesse.  Vaccinations, dépistages et traitements : des compétences étendues  La liste de médicaments et des dépistages que peuvent prescrire les sages-femmes a été modifiée et actualisée par deux décrets du 5 mars 2022 [1, 2] afin de « compléter l’arsenal thérapeutique indispensable et nécessaire dans le cadre de la gynécologie de prévention, notamment en termes de prescriptions des anti-infectieux pour les femmes, mais aussi pour leurs partenaires ». Les sages-femmes peuvent désormais : En ce qui concerne les vaccins, le décret du 21 avril 2022 relatif aux compétences vaccinales des sages-femmes [3] et l’arrêté du 12 août 2022 modifiant l’arrêté du 1er mars 2022 fixant la liste des vaccinations que les sages-femmes sont autorisées à prescrire et à pratiquer [4] ont étendu les compétences vaccinales des sages-femmes. Les sages-femmes peuvent prescrire et pratiquer les vaccins comme indiqué dans le tableau page 40.  Les sages-femmes peuvent également prescrire et pratiquer chez les nouveau-nés : Des exceptions sont à noter pour les personnes immunodéprimées qui ne peuvent être vaccinées par une sage-femme avec des vaccins vivants atténués (ROR, fièvre jaune, zona). Femme Nouveau-né Entouragede la femme enceinte Enfant mineur Rougeole-Oreillons-Rubéole X X X X Tétanos X X X X Diphtérie X X X X Poliomyélite X X X X Coqueluche X X X X Hépatite B X X X X Pneumocoque X X Grippe X X HPV X X Méningocoque C X X X Méningocoque B X Varicelle X Haemophilus Influenzaede type B X X BCG X Rage X Zona X Fièvre jaune X IVG : […]

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Pratiques

Vers des restrictions de visite pérennes ?

À la maternité des Diaconesses, à Paris, la réflexion sur les restrictions de visite est antérieure à la crise du Covid-19. En 2009, à l’occasion de l’épidémie de grippe H1N1, des limitations drastiques sont instaurées. Seules les visites du co-parent sont permises. Par la suite, constatant un meilleur repos mère-enfant, les équipes décident de rouvrir à tous les droits de visite mais de limiter les horaires autorisés. Ils sont fixés entre 16 h et 20 h, pour protéger le temps de la sieste.  CALME IMPOSÉ « Le personnel informe aussi les visiteurs qu’ils ne doivent rester que 15 à 20 minutes,explique Laurence Pavie, alors sage-femme coordinatrice. Une femme peut avoir besoin d’allaiter en privé, de changer ses protections et n’a pas besoin de gens qui s’incrustent pour poser des tas de questions. » Avec la crise du Covid, passé le temps des restrictions totales, le service décide de restreindre davantage son ouverture. Depuis septembre 2022, seuls la fratrie et le co-parent sont autorisés. « Nous avons tenté de rouvrir plus largement, mais les débordements ont été trop importants, témoigne Laurence Pavie. Les femmes ne réclament pas tant d’autres visiteurs. Comme elles restent peu en maternité, elles n’ont pas d’urgence à les voir dans l’établissement et peuvent donner rendez-vous lors de leur retour à domicile. Si le co-parent est absent, un autre proche est autorisé à venir. Il nous semble plus simple que le service impose des restrictions, car les femmes ont du mal à dire non et sont prises dans des jeux de loyauté familiale. » Pourtant, lors du premier confinement de mars 2020, les témoignages de femmes perturbées par les restrictions sévères de visite pullulent dans les médias. De leur côté, les professionnelles de terrain constatent un calme bienvenu en suites de couches, propice au repos des mères et des bébés. L’année suivante, trois […]

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Formation

Pourquoi et comment réduire l’exposition materno-fœtale aux polluants chimiques perturbateurs endocriniens ?

Pr Patrick Fénichel abd, Dre Thérèse Greck cd a Gynécologue/Endocrinologue CHU Nice, 170 chemin de l’Adret La Gaude 06610. Fenichel.p@chu-nice.fr b Professeur émérite Université Côte d‘Azur  c Gynécologue/Endocrinologue Montpellier d MEDEA Organisme de formation habilité à dispenser des actions labellisées DPC : Environnement et Périnatalité.www.medea.fr Résumé : Des travaux épidémiologiques et expérimentaux de plus en plus nombreux suggèrent que l’environnement périconceptionnel maternel, voire paternel, joue un rôle déterminant sur l’état de santé à venir de l’enfant. Les polluants chimiques à activité de perturbateurs endocriniens en mimant, bloquant ou perturbant l’action des hormones sur le développement fœtal sont ainsi susceptibles via des modifications épigénétiques de favoriser la survenue de maladies chroniques. Réduire l’exposition fœtale en délivrant des conseils simples et pratiques à la future mère lors d’une consultation préconceptionnelle devrait par conséquent constituer un objectif prioritaire en médecine préventive périnatale. Mots-clés : exposition maternelle ; micro-environnement fœtal, perturbateurs endocriniens, DOHAD, les 1000 jours, consultation préconceptionnelle Introduction L’examen attentif des registres de naissance dans les hôpitaux de zones industrielles britanniques plutôt défavorisées a permis, dans les années 80, à un épidémiologiste anglais, David Barker, de mettre en évidence une corrélation inverse très significative entre l’hypotrophie fœtale ou retard de croissance intra-utérin (identifiée par une réduction du poids de naissance normalisé pour l’âge gestationnel) et le risque de survenue, plusieurs décennies plus tard, de maladies métaboliques (obésité, diabète de type 2) et/ou de complications cardiovasculaires sévères (1). C’est l’environnement fœtal délétère (désordres nutritionnels et métaboliques de la mère, stress, tabac…) à l’origine de l’hypotrophie fœtale qui est responsable, via des modifications épigénétiques, du risque majoré à venir (figure 1 page 32).  De nombreux travaux expérimentaux et épidémiologiques ont ensuite confirmé l’hypothèse de Barker conceptualisée sous le nom de DOHAD (Origine développementale des pathologies chroniques adultes) (2). Ainsi chez le rongeur, il a été montré qu’indépendamment de toute susceptibilité génétique, l’hyperglycémie ou la carence […]

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Formation

Quand l’objectif n’est pas de nourrir de lait, mais d’amour !

EXPOSÉ Lors d’un précédent cas clinique (voir Profession Sage-Femme n° 282 – Juin 2022), je vous avais présenté la situation d’Ingrid*, à qui un cancer mammaire avait été diagnostiqué à la suite d’une mastite. Suite à ce diagnostic, la prise en charge de ce cancer a nécessité une mastectomie. À ce stade, Ingrid avait déjà sevré son bébé depuis plusieurs mois, mais elle a consulté afin de pouvoir avoir un avis quant à la possibilité d’un allaitement ultérieur. Nous avions alors pu parler de la possibilité d’allaiter avec un seul sein. Ingrid se demandait alors s’il serait possible de mettre son bébé au sein reconstruit même s’il n’y avait pas de lait. Elle voyait cela comme une sorte de revanche sur la mastectomie. Nous avions alors évoqué la possibilité d’une mise au sein à l’aide d’un dispositif d’aide à l’allaitement (DAL), avec ou sans bout de sein en silicone, en fonction de ce qui serait le plus confortable pour elle. Elle semblait rassurée de savoir qu’une possibilité lui était offerte. Ingrid consulte deux ans plus tard. L’objectif de cette entrevue est de revenir sur l’idée émise deux ans plus tôt. Une nouvelle mastectomie du sein controlatéral était programmée du fait d’une masse tumorale détectée lors des examens de surveillance. Une reconstruction était également envisagée et Ingrid, qui se projetait dans une future nouvelle maternité, évoquait sa tristesse de ne pas pouvoir revivre le contact physique inhérent à l’allaitement. Elle devait déjà faire le deuil de pouvoir donner son lait à un futur bébé, mais souhaitait ne pas devoir renoncer à ce contact physique, charnel. Sa demande était donc la suivante : « Nous avions parlé d’utiliser un DAL sur le sein reconstruit il y a deux ans. Pensez-vous qu’il serait possible d’envisager un “allaitement au DAL” sur les deux seins ? » Une telle situation […]

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Dossier

À Lyon, une consultation dédiée aux ménorragies

« Les premiers jours de mes règles, je dois changer de tampon toutes les heures, alors je préfère ne pas sortir de chez moi. » « La nuit, c’est le carnage sur les draps ! » « Quand une réunion de travail dure trop longtemps, j’ai peur de laisser des traces de sang sur la chaise. » « Les anémies à répétition, la fatigue, la charge mentale des règles qui me pourrissent la vie, je n’en peux plus… »De tels témoignages, les docteures Giulia Gouy et Lucia Rugeri en recueillent depuis mai 2021. À l’hôpital de la Croix-Rousse (Hospices civils de Lyon), la gynécologue et l’hématologue ont ouvert une consultation dédiée aux ménorragies, une première en France. Chaque vendredi, elles reçoivent une dizaine de patientes de tous âges et venant de la France entière. En quelques heures, ces femmes rencontrent les deux médecins, passent plusieurs examens et se voient proposer une prise en charge.  Les ménorragies se définissent par des pertes de sang menstruel supérieures à 80 ml par cycle, à objectiver par un interrogatoire (fréquence des changes, présence de caillots…) et le score de Higham (voir encadré). Il faut aussi envisager la fatigue, une anémie et le retentissement sur la vie privée et professionnelle. En février 2021, le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) a mis à jour ses recommandations(1) pour le diagnostic et la prise en charge des ménorragies. Alors pourquoi une telle consultation ? « Parce qu’il y a un sous-diagnostic flagrant des ménorragies et que les femmes concernées souffrent d’une errance médicale considérable, déclare la docteure Giulia Gouy. S’il y a un tabou des règles, alors les règles hémorragiques, c’est carrément l’omerta ! » Et pourtant, 11 à 13 % des femmes en âge de procréer souffrent de ménorragies, et même un quart des plus de 41 ans(2) !  Les hormones en première intention Ce matin gris d’octobre, c’est Olivia*, 20 ans, […]

Dossier

Ménorragies, quoi de neuf ?

« Suite à la crise des progestatifs et devant le besoin de mieux considérer les alternatives à l’hystérectomie, il était nécessaire de proposer de nouvelles recommandations concernant la prise en charge des ménorragies. » Le professeur Jean-Luc Brun, chirurgien gynécologue au CHU de Bordeaux, a coordonné le texte publié sous l’égide du Collège national des gynécologues-obstétriciens français (CNGOF) en 2022 (1). Il remplace donc les recommandations de 2008 et répond à 37 questions selon la méthodologie Pico-Grade, approche qui évalue et compare pour une population ou un problème donné les interventions et leurs résultats, en attribuant des grades de preuve plus ou moins élevés. CRISE DES PROGESTATIFS ET APPARENTÉS Les spécialistes ont en effet craint une augmentation des hystérectomies de première ou deuxième intention suite aux restrictions de prescriptions ou au retrait de plusieurs traitements progestatifs et apparentés (modulateurs sélectifs des récepteurs à la progestérone), jusqu’alors employés pour traiter les ménorragies associées à un fibrome ou à de l’endométriose. La première « crise » a concerné l’acétate d’ulipristal (Esmya®). Employée comme traitement des fibromes utérins avant chirurgie, la molécule a fini par perdre son autorisation de mise sur le marché (AMM) européen en 2020, en raison de risques hépatotoxiques jugés graves, suite à de premières alertes en 2017. Une étude d’Audrey Chevrot note d’ailleurs que les hystérectomies dans le traitement des fibromes utérins augmentent de 42 000 à 44 000 dès 2018 (2). En 2021, l’Agence française de sécurité du médicament (ANSM) et la Caisse primaire d’assurance maladie confirment un surrisque de méningiome chez les femmes exposées à l’acétate de nomégestrol (Lutényl® et ses génériques) ou à l’acétate de chlormadinone (Lutéran® et ses génériques). Ces macroprogestatifs sont désormais indiqués seulement en dernier recours, pour traiter une endométriose ou des -ménorragies associées à un fibrome en préopératoire et pendant une période courte (3). Leur utilisation implique une surveillance […]

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Actus

Pour le CNGOF, il faut s’adapter aux nouvelles générations d’obstétriciens

« Les gynécologues-obstétriciens ne veulent plus exercer dans des petites villes ou des maternités qui ne réalisent pas suffisamment d’accouchements et, dans le même temps, ils sont en burnout, dès l’internat, dans les établissements de type 3. » C’est ainsi qu’Olivier Morel, responsable de la maternité de Nancy, résume la situation, estimant qu’elle est très proche de celle des anesthésistes, pédiatres et sages-femmes. Le professeur a dirigé la commission en charge du rapport sur la démographie médicale voulu dès 2019 par Israël Nisand, alors président du CNGOF. Ce dernier souhaitait identifier le nombre de postes vacants de gynécologues-obstétriciens. La commission a dressé un tableau plus complet, s’appuyant sur diverses thèses de médecine récentes. Et le rapport de s’intituler « Pérennité des équipes, quel avenir pour la continuité des soins en gynécologie-obstétrique ?» MANQUE DE DONNÉES En augmentation régulière depuis 2012, le nombre de gynécologues-obstétriciens s’établit à 5132 en 2020. Et les projections pour 2030 tablent sur près de 6600 professionnels en activité à cet horizon. « La quantité totale de professionnels n’est pas le sujet », balaye Olivier Morel. En effet, la discipline implique plusieurs spécialisations possibles et des modes d’exercice différents. Le nombre total ne reflète donc pas l’offre de soins disponible.« Étant donné qu’aucune norme ne fixe le nombre d’équivalents temps pleins nécessaires en fonction de l’activité, le nombre de postes vacants publiés n’est pas un indicateur fiable, poursuit-il. De plus, les ARS ne collectent pas les données dont disposent les établissements. Quant à l’Observatoire national de la démographie des professions de santé, il n’emploie que quatre personnes pour aiguiller la décision. L’Ordre non plus ne dispose pas de chiffres détaillés. Nous manquons donc cruellement de données concernant les modalités et types d’exercice, la participation à la permanence des soins ou l’état démographique des structures. » Le pilotage démographique est donc en réalité inexistant. C’est pourquoi la […]

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Actus

Entretien avec Aurore Koechlin : « Le suivi gynécologique obéit à des normes sociales »

Comment définissez-vous la « norme gynécologique », à laquelle vous associez le concept de « carrière gynécologique » ? Je définis la norme gynécologique comme la norme qui enjoint aux femmes de consulter régulièrement un ou une professionnelle de santé pour le suivi gynécologique, en particulier pour la contraception et le dépistage. La gynécologie médicale est née dans les années 1930, mais la norme gynécologique apparaît dans les années 1960, avec la légalisation de la contraception, accompagnée de sa médicalisation. On passe alors d’une logique de traitement des pathologies à une logique préventive, qui s’applique aussi bien à la prévention des avortements par la contraception qu’à la prévention des cancers par le frottis ou la palpation des seins. Avec mon étude de terrain, menée essentiellement dans deux espaces sociaux bien différents – un service de PMI en Seine-Saint-Denis et une clinique privée d’un des arrondissements les plus riches de Paris -, j’ai voulu montrer la construction sociale qui se cache là où nous ne voudrions voir qu’un destin biologique. Le suivi gynécologique obéit bien à des normes sociales. J’appelle carrière gynécologique le fait d’entrer dans le suivi gynécologique, et de le poursuivre régulièrement, idéalement une fois par an, toute la vie. L’entrée majoritaire dans la carrière gynécologique s’est construite sur la simultanéité avec l’entrée dans la contraception et la sexualité hétérosexuelle. Le monopole de la prescription contraceptive détenu par les professionnels et professionnelles de la gynécologie constitue un instrument très matériel de renforcement de la norme gynécologique. Inversement, la norme préventive repose en grande partie sur l’initiative des patientes. La principale cause de l’arrêt de la carrière gynécologique est l’arrêt de la contraception médicale. La norme gynécologique ne peut dès lors plus s’appuyer sur la norme contraceptive. Ce changement peut créer les conditions d’un décrochage. La ménopause constitue le deuxième moment fort de décrochage. Cela est lié […]