Que faire en cas d’accident de travail ou de maladie professionnelle ? 

Un accident du travail ou une maladie professionnelle peut survenir au cours d’une carrière de sage-femme. Mieux vaut savoir comment se protéger et connaître ses droits, qui diffèrent selon le secteur d’activité.


© Nour Richard-Guerroudj

Un accident de travail est un événement soudain qui, quelle qu’en soit la raison, a causé un dommage corporel ou psychologique au travailleur et qui est survenu pendant son activité professionnelle, ou pendant un stage de formation professionnelle. L’accident de travail inclut également l’accident de trajet, c’est-à-dire un événement soudain et imprévu qui cause un dommage corporel au travailleur pendant le trajet entre sa résidence et son lieu de travail. Il peut par exemple s’agir d’une coupure, d’une brûlure, d’une douleur musculaire apparue brutalement suite au port d’une charge, d’un malaise cardiaque, d’une dépression, de trouble anxieux ou encore d’un stress post–traumatique.

La maladie professionnelle est une maladie contractée du fait du travail (maladies contractées suite à un accident d’exposition au sang, troubles musculo-squelettiques). Les conséquences de ces évènements ne sont pas les mêmes selon que la sage-femme exerce en libéral ou en salariat. 

EN LIBÉRAL

Les droits 

Le régime de protection sociale des professionnels libéraux ne couvre pas les risques d’accidents du travail, d’accidents de trajet ni de maladies professionnelles (AT/MP). En cas d’AT/MP, les frais de santé inhérents seront pris en charge aux taux et conditions habituelles, comme pour toute maladie, mais aucun complément de revenu ne sera versé, notamment en cas d’incapacité secondaire à cet accident ou maladie. 

Il est donc possible de souscrire une assurance volontaire auprès de la CPAM. Mais cette assurance volontaire ne permet pas à la sage-femme de percevoir des indemnités journalières. Elle permet simplement la prise en charge des frais de santé inhérents à l’accident du travail et donnera droit au versement d’une indemnité en capital ou d’une rente, s’il y a reconnaissance d’une incapacité permanente de travail, en lien avec l’accident du travail.

La base de calcul de la cotisation pour cette assurance est le revenu annuel, soit le bénéfice non commercial (BNC) de chaque année, indiqué lors de la demande d’admission à l’assurance volontaire AT/MP qui sert de base, d’une part au calcul de la cotisation et, d’autre part, au calcul des indemnisations (indemnité en capital ou rente) versées en cas d’incapacité permanente.

Il est également possible de souscrire une assurance facultative privée prenant en charge l’accident du travail spécifiquement.

Il faut rappeler qu’en cas d’arrêt de travail, quelle qu’en soit la cause, l’indemnisation de l’arrêt de travail de la sage femme libérale est pris en charge les trois premiers mois par la CPAM, qui verse durant cette période 50 % du BNC moyen des 3 dernières années avec un minimum de 630 euros par mois et un maximum de 5 071 euros par mois.

Passés ces 90 jours, c’est la CARCDSF qui assurera le versement d’indemnités journalières à compter du 91e jour pour un montant de 45,07euros par jour en 2023.

La déclaration 

Tout accident doit être déclaré dans les 48 heures à la caisse -d’Assurance Maladie de la sage-femme.

En ce qui concerne une maladie professionnelle, dès lors que le médecin constate une détérioration de l’état de santé de la sage-femme liée à son travail, il est possible de demander la reconnaissance de l’origine professionnelle de la maladie. Pour ce faire, il faut remplir un formulaire de déclaration de maladie professionnelle ou de reconnaissance de maladie professionnelle dans les 15 jours suivant le début de l’arrêt de travail.

La CPAM a ensuite un délai de 120 jours pour se prononcer sur le caractère professionnel ou non de la maladie. Une enquête complémentaire et des examens médicaux peuvent être diligentés par la CPAM. En cas de rejet de la demande, il faudra saisir dans un premier temps la commission de recours amiable (CRA) puis le tribunal administratif. 

DANS LA FONCTION PUBLIQUE

Les droits

Lorsqu’une sage-femme de la fonction publique hospitalière ou territoriale est victime d’un accident de travail ou de trajet « reconnu imputable au service », elle est placée en congé pour invalidité temporaire imputable au service (CITIS). Dans ce cas, elle conserve l’intégralité de son traitement indiciaire, de l’indemnité de résidence et du supplément familial de traitement ainsi que la prime de service, sauf en cas d’absence pendant une année complète. Les frais médicaux entrainés par l’accident sont également entièrement pris en charge. 

La déclaration

La déclaration d’accident doit être transmise à l’administration dans les 15 jours suivant l’accident, par formulaire précisant les circonstances de l’accident de travail ou de trajet et les lésions causées par cet accident, accompagné d’un certificat médical établi par un médecin indiquant la nature et la localisation des lésions résultant de l’accident et la durée probable de l’incapacité de travail.

Dans le délai d’un mois après la déclaration, l’administration se prononce sur l’imputabilité au service de l’accident. Différents examens médicaux peuvent être demandés par l’administration et une enquête peut être menée.

À la fin du CITIS, si la sage-femme est apte à reprendre ses fonctions, elle est réintégrée dans son emploi ou réaffectée dans un emploi correspondant à son grade. Pour les fonctionnaires -hospitaliers absents plus de 12 mois consécutifs, leur emploi peut avoir été déclaré vacant et le fonctionnaire peut avoir été remplacé par un autre fonctionnaire. Il sera alors réintégré en surnombre.

Le poste de travail peut éventuellement être adapté à l’état de santé si nécessaire.

En cas d’inaptitude à reprendre ses fonctions, la sage-femme peut bénéficier d’une période de préparation au reclassement ou être directement reclassée sur un emploi compatible avec son état de santé. Si la sage-femme est reconnue définitivement inapte à l’exercice de tout emploi, elle peut être mise à la retraite pour invalidité quels que soient son âge et son nombre de trimestres d’assurance retraite.

Pour les fonctionnaires, une fois que l’accident de service ou la maladie professionnelle a fait l’objet d’une prise en charge par l’administration, il existe une procédure qui permet de solliciter une indemnisation -complémentaire des préjudices en engageant la responsabilité de l’administration employeur.

Il existe en effet un principe de responsabilité sans faute de l’employeur concernant les accidents de service et les maladies professionnelles. C’est-à-dire que la victime de l’accident ou de la maladie n’a pas à prouver que l’administration a commis une faute pour obtenir la réparation de tous ses préjudices personnels et patrimoniaux. L’administration employeur doit en effet assurer la sécurité de ses travailleurs, et la seule survenue de l’accident ou de la maladie suffit à prouver qu’elle n’a pas rempli son obligation. 

La procédure consiste à former un référé expertise afin de faire évaluer les préjudices par un médecin expert, puis de déposer une demande indemnitaire préalable obligatoire auprès de l’administration ayant pris en charge l’accident ou la maladie. En cas de rejet de la demande, il faudra saisir le tribunal administratif.

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CHEZ LES SALARIÉES DU PRIVÉ

Les droits

Lors d’un arrêt maladie dû à un accident du travail, un accident de trajet ou à une maladie professionnelle, le contrat de travail est suspendu. Cette période de suspension est prise en compte pour la détermination de tous les avantages légaux et conventionnels liés à l’ancienneté et pour le calcul des droits à congés payés (dans la limite de 12 mois ininterrompus).

Au terme de l’arrêt de travail, le salarié retrouve son emploi ou un emploi similaire. Si la salariée est déclarée inapte, l’employeur doit ouvrir une procédure de reclassement. 

Au cours de la suspension du contrat de travail consécutive à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, l’employeur ne peut rompre le contrat pour ce motif. Pour pouvoir licencier le salarié, l’employeur devra justifier soit d’une faute grave du salarié, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l’accident ou à la maladie.

La règle s’applique même si la procédure de licenciement a été engagée avant l’accident.

En revanche, la maladie ou l’accident du travail ne font pas obstacle à l’échéance du terme d’un CDD.

Le régime des indemnités journalières (IJ) de Sécurité sociale est plus favorable en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle.

Les indemnités sont dues si le salarié doit interrompre son activité professionnelle, quelle que soit la durée de son activité antérieure.

Le jour de l’accident est payé par l’employeur comme si le salarié avait travaillé normalement et dès le lendemain les IJ sont versées jusqu’à la date de guérison ou de consolidation.

Les indemnités journalières sont égales à 60 % du salaire journalier de référence (SJR) pendant les 28 premiers jours de l’arrêt de travail et à 80 % du SJR à partir du 29e jour. Une rente accident de travail sera allouée en cas d’incapacité résultant de l’accident ou de la maladie. C’est une réparation forfaitaire qui dépend du taux d’incapacité constaté par l’Assurance Maladie. Il est également possible de percevoir des compléments d’indemnités versés par l’employeur afin de disposer d’un maintien de salaire le plus complet possible. Cela dépend généralement de l’ancienneté (au moins un an dans l’entreprise). Il peut également y avoir des dispositions dans la convention collective. 

La déclaration

La sage-femme salariée du privé victime d’un accident de travail doit informer (ou faire informer) son employeur de son accident de travail par tout moyen (mail, téléphone, SMS,…), dans la journée où s’est produit l’accident ou au plus tard dans les 24 heures (sauf en cas de force majeure, d’impossibilité absolue ou de motif légitime, par exemple en cas d’hospitalisation).

C’est ensuite à l’employeur de déclarer l’accident de travail à la CPAM dans les 48 heures. Il peut alors formuler des remarques argumentées sur le caractère professionnel ou non de l’accident. Si l’accident donne lieu à un arrêt de travail, l’employeur doit également adresser à la CPAM une attestation nécessaire au calcul des indemnités journalières auxquelles la sage-femme a droit. L’employeur doit préciser si le salaire est maintenu en totalité. Si c’est le cas, c’est l’employeur qui perçoit les indemnités journalières. L’employeur doit également remettre à la salariée une feuille d’accident qui permet de bénéficier du tiers payant lorsqu’elle est présentée pour les soins, car les frais médicaux liés à l’accident du travail sont remboursés à 100 % sans avance de frais.

L’accident de travail doit également être constaté par un médecin, au choix du salarié. Le médecin établit un certificat médical décrivant les lésions, leur localisation, les symptômes et les séquelles éventuelles de l’accident. Ce certificat sera adressé à la CPAM.

Après réception de la déclaration d’accident et du certificat médical initial, la CPAM a un délai de 30 jours pour reconnaître ou non le caractère professionnel de l’accident. Un examen ou une enquête complémentaire peuvent être diligentés par la CPAM en cas de réticence de la part de l’employeur sur le caractère professionnel de l’accident. Si le caractère professionnel de l’accident n’est pas reconnu, la salariée devra saisir la commission de recours amiable (CRA) puis le tribunal administratif en cas de maintien du refus. 

En ce qui concerne une maladie professionnelle, la sage-femme salariée n’a pas de démarche particulière à effectuer auprès de son employeur, qui sera informé par la CPAM. Le dossier de déclaration de la maladie professionnelle intégrant un certificat médical et le résultat des éventuels examens médicaux complémentaires doit être adressé à la CPAM qui se prononcera sur le caractère professionnel ou non de la maladie dans un délai de 120 jours.

■ Marie Josset-Maillet, avocate 

NB : Lorsqu’une administration rejette une demande (par exemple de reconnaissance du caractère professionnel d’un accident ou d’une maladie), les délais pour contester cette décision sont généralement très courts (un ou deux mois). Que ce soit pour saisir la CRA ou le tribunal administratif, il faut être très vigilant et s’adresser à un professionnel compétent le plus ­rapidement possible, après avoir consulté son assurance protection juridique. En effet, une fois ces délais expirés, aucune action n’est possible. 

Les délais de recours figurent toujours sur les courriers adressés par l’administration et ils courent généralement à compter de la date de réception.