Un gant connecté pour visualiser la tête fœtale

Identifier la position de la tête fœtale et les forces qui s’exercent sur elle : telle est la promesse d’un gant connecté en cours de développement à la faculté de médecine de Londres. L’outil, destiné à aider les professionnels des pays à faibles ressources, pourrait aussi servir à l’apprentissage par simulation dans les pays développés.

Quatre sutures à l’avant du crâne, trois à l’arrière. Des capteurs sensoriels positionnés sur l’index d’un gant chirurgical permettent de transmettre les sensations haptiques en signaux que l’on pourra lire sur l’écran d’un smartphone afin de connaître la position de la tête fœtale. À l’aide du bout du doigt, il sera possible de suivre les fontanelles et l’écran affichera s’il s’agit de la fontanelle avant ou arrière. Chaque suture se traduit par un pic sur l’écran. Il suffit de les compter ensuite. C’est l’innovation que la chercheuse britannique Shireen Jaufuraully est en train de développer à la faculté de médecine de l’Université de Londres. Cette jeune gynécologue-obstétricienne en a fait son sujet de thèse. « Ce gant est vraiment innovant », reconnaît Hélène Bouchot. Sage-femme enseignante à la faculté de médecine Montpellier-Nîmes depuis 2010, elle conçoit et anime, en binôme avec Valérie Courtin, toutes les séances de simulation au département universitaire de maïeutique. « Aujourd’hui, l’apprentissage est basé sur l’expérience. Tous les outils qui permettent de simuler les gestes sont très utiles. » L’école de maïeutique de Nîmes est très équipée en technologie : deux simulateurs corps entier, des ventres fantômes, un simulateur virtuel de toucher vaginal et périnéal, un entraînement par serious games. Elle forme chaque année 120 étudiantes et étudiants et autant de médecins et urgentistes en développement professionnel continu. La praticienne a pris soin d’étudier l’article scientifique publié en janvier dernier dans la revue Frontiers in Global Women’s Health : « Visualiser la position de la tête grâce à des instruments est complémentaire à tous les outils utilisés en formation. Une fois sur 100, on a recours aux ventouses ou forceps. Ce gant pourrait aussi nous indiquer où mieux les placer. » 

© Wellcome EPSRC Centre for Interventional and Surgical Sciences, University College London, London, UK

Gant connecté développé par la chercheuse britannique Shireen Jaufuraully.

© Wellcome EPSRC Centre for Interventional and Surgical Sciences, University College London, London, UK

Mesurer les forces 

Comprendre et mesurer la répartition des forces sera une prochaine étape du développement. Pour l’instant, les capteurs sont disposés sur l’index, mais d’autres pourraient être positionnés au niveau de la paume afin de ressentir la pression exercée sur le fœtus. « Dans les cas où l’utilisation de forceps ou de ventouses n’a pas fonctionné, repousser le bébé vers l’intérieur de l’utérus ou le tourner est un geste délicat qui peut causer des blessures au cou ou à la colonne vertébrale. Le gant connecté pourrait estimer la force et la direction idéale de la pression exercée », anticipe la chercheuse britannique. Dans un premier temps, l’idée est de mettre à disposition de tous un gant connecté et fiable au prix très abordable de 1 euro. Ce gant est conçu pour être jetable et utilisable sous un autre gant à usage unique, par précaution d’hygiène. « Dans les pays à faible revenu, dans certaines conditions, les naissances sont entourées de personnes peu entraînées, et l’accès à du matériel d’échographie est plus rare. » Les smartphones étant plus accessibles, cette technologie peu coûteuse pourra donc être diffusée facilement. 

Le gant a pour l’instant été testé avec succès en laboratoire sur des têtes modélisées en 3D. Dès que les autorisations éthiques seront obtenues, une version sans fil sera évaluée en vie réelle.

■  Valérie Handweiler

Source : Preventing stillbirth from obstructed labor: A sensorized, low-cost device to train in safer operative birth – publié le 30 janvier 2023 – Frontiers in Global Women’s Health.