© D.R. En quoi consiste le projet Bip ? L’objectif global de Bip est d’essayer de comprendre les mécanismes des inégalités sociales de santé entre femmes migrantes et femmes natives. Il s’agit de voir si, à côté des mécanismes déjà documentés, un phénomène de discriminations inconscientes serait à l’œuvre, participant à ces inégalités de santé. Un premier volet épidémiologique consistait à vérifier l’existence de soins différenciés en périnatalité entre femmes migrantes et femmes natives, en particulier les femmes venant d’Afrique subsaharienne dont nous savons qu’elles présentent les taux de morbidité et mortalité les plus élevés. Nous avons étudié, au travers d’analyse de bases de données, cet aspect dans le cas de la césarienne, du dépistage de la trisomie 21 et de l’analgésie péridurale pendant le travail. Ces volets sont achevés et ont fait l’objet de publications. Nos résultats montrent l’existence de soins différenciés en matière de césarienne, notamment en cours de travail, et de dépistage de la trisomie 21. En revanche, aucune différence dans les soins n’a été retrouvée concernant l’administration de la péridurale et les délais dans lesquels elle était pratiquée. Le deuxième volet consistait à étudier les préjugés implicites et inconscients chez les professionnels de santé en périnatalité : obstétriciens, anesthésistes et sages-femmes. Car, comme n’importe qui, les professionnels de santé peuvent être porteurs de préjugés ethno-raciaux, susceptibles de déterminer des pratiques de soins différentes selon les catégories sociales et sans que ces différences ne reposent sur des bases médicales pertinentes. L’analyse est achevée, a fait l’objet d’une communication orale et nous préparons la publication des résultats. Nous avons adapté des outils mis au point par des psychologues sociaux de l’université d’Harvard. Lorsqu’on teste les biais implicites, il faut s’assurer au préalable de l’existence de préférences explicites, c’est-à-dire d’un affichage ouvertement raciste. Nos résultats en retrouvent très peu. Comme nous nous intéressons…
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DISCRIMINATIONS RACIALES EN SANTÉ, DES RECHERCHES POUR AGIR
TweetEn septembre 2020, en pleine crise du Covid-19, plusieurs spécialistes de la périnatalité français signent un éditorial dans Gynécologie Obstétrique Fertilité et Sénologie, intitulé « Racisme systémique et inégalités de santé, une urgence sanitaire et sociétale révélée par la pandémie Covid-19 ». Parmi les signataires : Priscrille Sauvegrain, sage-femme, enseignante à l’université de Paris et docteure en sociologie. Au sein de l’équipe de recherche en épidémiologie obstétricale périnatale et pédiatrique (Épopé) de -l’Inserm, c’est elle qui a introduit l’étude des discriminations sur des critères ethno-raciaux dans les soins, à l’échelle de la relation de soins comme à l’échelle institutionnelle. Elle est notamment responsable de la -coordination scientifique de l’axe sociologique du projet Biais implicites et soins différenciés en périnatalité (Bip), co-écrit avec l’obstétricien Élie Azria (lire p. 24). DÉPASSER LES FREINS À LA RECHERCHE Dans cet éditorial, les auteurs appellent à sortir de la frilosité à accepter le lien entre discriminations ethno-raciales et inégalités sociales de santé. Car « les différences de traitement fondées sur l’origine sont un phénomène de grande ampleur », selon un rapport de la défenseure des droits publié en 2020. Les publications d’Épopé sur la cohorte PreCare et les différents volets de l’étude Bip soulignent bien l’existence de préjugés implicites et de soins différenciés (lire p. 24). Les chercheurs souhaitent aussi pouvoir disposer de données. Dénonçant le refus de statistiques ethniques en France, ils estiment qu’« au nom d’un universalisme qui consacre le principe d’une République une et indivisible, l’idée qu’existeraient des communautés est niée et la possibilité de travailler à partir de catégories racialisées rompant cette unité est grevée ». Il n’est pas surprenant que ce soient des spécialistes de la périnatalité qui aient sonné l’alarme, tant les inégalités raciales sont criantes et funestes dans ce champ, en France comme dans le reste du monde. La dernière Enquête nationale confidentielle sur les morts […]

TRIBUNE : Allergies alimentaires et protection de l’allaitement
TweetComité de rédaction Dr Dominique Leyronnas, pédiatre néonatologiste retraité, président de la CoFAM. Dre Suzanne Colson, PhD, sage-femme retraitée, Professeure adjointe honoraire, Canterbury Christ Church University, Membre du conseil administratif et du conseil scientifique de la CoFAM. Marie Courdent, IPDE retraitée, IBCLC, DIULHAM animatrice LLL France, conseil scientifique de la CoFAM. Chevalier de la Légion d’honneur. Dre Julie Hamdan, médecin généraliste, animatrice LLL France, IBCLC, DIULHAM. Vanessa Lasne, consultante en lactation IBCLC, animatrice LLL France. Marie-Xavier Laporte, infirmière, diététicienne-nutritionniste et consultante en lactation (DIULHAM), présidente d’IPA. Dre Mélissa Mialon, PhD, professeure adjointe de recherche, Trinity College Dublin, membre du Groupe d’action des professionnels de la santé contre le parrainage de l’industrie des laits infantiles (PHASFI) de l’Organisation mondiale de la santé. Britta Boutry, PhD, consultante en lactation IBCLC, coordinatrice WBTi, consultante auprès de GIFA. Adriano Cattaneo, épidémiologiste retraité, IBFAN Italie. Signataires ACLP – Association des consultants en lactation professionnels de santé AFCL – Association française des consultants en lactation CoFAM – Coordination française pour l’allaitement maternel Crefam – Centre de recherche, d’évaluation et de formation à l’allaitement maternel FormIndep – Pour une inFormation indépendante en santé https://formindep.fr LLL F – La Leche League France IBFAN France – International Baby Food Action Network La Société française d’allergologie (SFA) suggère de donner 10 ml de « lait premier âge », chaque jour, aux nouveau-nés allaités à risque atopique (c’est-à-dire aux bébés ayant des antécédents familiaux d’allergie). Cette récente recommandation s’applique dès la première semaine de vie, et ce jusqu’à la diversification (1,2). Ainsi, cette introduction de lait industriel servirait, selon la SFA, à prévenir l’allergie aux protéines de lait de vache. Le « lait premier âge », également appelé « préparation pour nourrissons » ou « PPN » contient notamment des protéines du lait de vache. En tant qu’associations et professionnels de santé et/ou de périnatalité, nous dénonçons cette proposition...



Le refus de soins
TweetD’un point de vue juridique, c’est la loi Kouchner du 4 mars 2022 qui a consacré le droit pour tout patient de refuser des soins, en complétant l’article 16-3 du Code civil qui fixe le grand principe du respect de l’intégrité du corps humain. L’article L1111-4 du Code de la santé publique dispose que : « Toute personne a le droit de refuser ou de ne pas recevoir un traitement. Le suivi du malade reste cependant assuré par le médecin, notamment son accompagnement palliatif. Le médecin a l’obligation de respecter la volonté de la personne après l’avoir informée des conséquences de ses choix et de leur gravité. Si, par sa volonté de refuser ou d’interrompre tout traitement, la personne met sa vie en danger, elle doit réitérer sa décision dans un délai raisonnable. (…) Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment. Lorsque la personne est hors d’état d’exprimer sa volonté, aucune intervention ou investigation ne peut être réalisée, sauf urgence ou impossibilité, sans que la personne de confiance prévue à l’article L. 1111-6, ou la famille, ou, à défaut, un de ses proches ait été consulté. » La loi consacre ainsi le droit du patient à être informé sur son état de santé, c’est-à-dire sur les traitements et actes proposés, leur utilité, leur degré d’urgence, les risques qu’ils peuvent engendrer et les alternatives possibles. Il consacre aussi la nécessité du consentement libre et éclairé du patient aux actes et traitements qui lui sont proposés. La loi reconnaît au patient la possibilité absolue de refus de soins. LE REFUS DE SOINS : UN DROIT Dans le cas d’une femme enceinte, ses décisions influent sur sa propre santé et sur celle de son enfant à naître. La question peut...